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Partons à la découverte d’une tradition musicale si vieille qu’on n’en distingue plus la source exacte : la musique klezmer. La musique klezmer est la musique traditionnelle des Juifs Ashkénazes, les Juifs d’Europe centrale et orientale, dont la langue vernaculaire est le yiddish. Des shtetl du Moyen Âge aux capitales modernes du monde occidental, la musique klezmer a traversé les lieux et les âges, s’enrichissant au contact des cultures qu’elle rencontrait en chemin.

Écrit par Fabienne Pasau

Et ce voyage, on l’entreprend aussi, en compagnie de Joëlle Strauss, violoniste et chanteuse, notamment au sein de l’Astor Klezmer TrioElle donne par ailleurs des conférences sur la culture yiddish et la musique klezmer.

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La musique omniprésente dans la culture juive

Avant la Seconde Guerre mondiale, de 11 à 13 millions de personnes parlaient le yiddish dans le monde. Les petits shtetler, datant du Moyen Âge, se situaient en Europe de l’Est, là où les communautés juives vivaient, dans l’actuelle Pologne, Russie, Moldavie, Ukraine, Roumanie, Estonie…

Plus ou moins deux tiers des 3 millions de Juifs de Pologne vivaient dans des shtetler en 1931. On peut imaginer un tableau de Marc Chagall, avec ses petites maisons en bois vétustes où la vie passe au rythme de fêtes juives, avec les bougies de shabat, les prières, les ruelles, les petits métiers, les synagogues, sans oublier la marieuse qui cherche le meilleur parti. Le mariage est d’ailleurs un des thèmes principaux de la musique klezmer.

Les musiciens, les klezmorim, étaient des baladins, des musiciens ambulants, on était klezmer de père en fils. Les femmes n’avaient pas le droit d’être klezmer et de sortir en public. On se formait sur le tas. Ces hommes avaient un statut ambigu :

D’un côté, ils étaient considérés comme des mendiants, ils étaient pauvres, peu éduqués, peu pratiquants. Ils menaient une vie de voyage et de rencontres, loin de l’autorité unique des rabbins.

Mais d’un autre côté, ils étaient admirés et parfois très célèbres. Ils parcouraient l’Europe, jouaient de ville en ville pour animer les fêtes, les bar mitsva, l’inauguration de synagogues, les circoncisions,… et surtout les mariages.

La musique est toujours omniprésente dans la culture juive et fait partie intégrante de tous les moments importants d’une vie.

Marc Chagall

Marc Chagall © flickr

L’âme juive dans la musique

À l’époque biblique, la musique instrumentale accompagnait le culte mais elle a été abolie en signe de deuil après la destruction du second temple de Jérusalem en 70. C’est seulement au Moyen Âge qu’elle est revenue pour accompagner les fêtes joyeuses du judaïsme.

Comme la langue yiddish s’est nourrie des langues parlées sur les territoires de la diaspora juive, la musique klezmer s’est nourrie des pays dans lesquels les klezmorim se produisaient : on y retrouve des bulgares, des danses roumaines, du jazz, du tango et même des sambas en yiddish.

Les instruments de base du klezmer étaient le violon, la flûte, souvent le piccolo, le cymbalum et le violoncelle. La clarinette n’est arrivée que vers la 2e moitié du 19e siècle.

Certains airs ressemblent parfois fort à la musique tzigane, roumaine ou bulgare, mais dans la musique klezmer comme dans la langue yiddish, l’âme juive est présente, avec ce mélange de joie et de tristesse qu’on peut résumer en Lachen mit tränen, Rire avec des larmes.

Les États-Unis et le jazz

À la fin du 19e siècle, des millions de Juifs fuient les persécutions en Europe, ils partent vers New York et Buenos Aires. Le klezmer se pare alors de nouvelles couleurs.

À New York, sur la Seconde Avenue, ils recréent un véritable shtetl où on ne parle que le yiddish. On y joue 20 à 30 spectacles, en yiddish chaque soir, entre théâtre et music-hall, qui déborderont peu à peu des quartiers juifs pour gagner d’autres villes.

Depuis le 16e siècle, des paroles s’étaient ajoutées au répertoire klezmer instrumental. D’abord chantées par des hommes, avec le music-hall yiddish, on assiste à une véritable starification des interprètes féminins et masculins. Un véritable star system, digne de Hollywood, se met en place.

Avant la Seconde Guerre mondiale, le jazz bat son plein aux Etats-Unis, il influence considérablement la musique klezmer et le chant yiddish. Ce sont principalement des Juifs qui tiennent l’industrie du jazz, parce que les Blancs ne veulent pas produire les rythmes jazz noirs. Ella Fitzgerald, Louis Armstrong, Ray Charles, Frank Sinatra ont tous chanté des chants yiddish. Le tube jazz de 1938 est un chant yiddish : Bei Mir Bist Du Shein.L’Argentine et le tango

L’autre grand pôle d’immigration est Buenos Aires, à partir des années 1880. Le gouvernement cherche à peupler ses terres. L’immigration massive des Juifs en Argentine correspond à la naissance du tango. Les Juifs, Italiens, Espagnols, Français… logeaient dans les bas-fonds de la ville, où on pouvait entendre autant du tango que du klezmer. Des tangos sont composés en yiddish.

Après la guerre

Après la Shoah, le peuple juif devait se reconstruire. En Israël ou ailleurs, les Juifs voulaient reconstruire une nouvelle vie. Le désir de beaucoup d’entre eux était l’assimilation, ils ne parlaient plus le yiddish à leurs enfants. Pour d’autres, c’est le sionisme qui a prévalu.

Après toutes les souffrances vécues en Europe, l’oubli du passé a signifié l’abandon du yiddish. L’hébreu est devenu la langue d’unité de la communauté juive. Même les stars musicales du klezmer ont succombé à la mode musicale israélienne. La nouvelle musique était le rock ‘n roll, attrayante pour une jeunesse qui ne demandait qu’à s’amuser.

Depuis les années 70, on assiste à une renaissance de la musique klezmer, partie des États-Unis pour inonder l’Europe. Aujourd’hui, en termes de style, tout est permis. Mais avec un fil rouge : l’âme juive !

 

[Source : http://www.rtbf.be]

Capture d’écran présentant les alphabets de la langue Ewe, prise sur de la chaîne  YouTube de Sena Gameli [1]

Écrit par Jean Sovon

Au Togo, la promotion des langues nationales hormis le français relève surtout d’initiatives personnelles en ligne, même si le gouvernement tente de promouvoir leur enseignement.

Alors que le français demeure la langue officielle du Togo, 53 langues [2] locales y sont parlées. Elles appartiennent principalement à deux groupes: les langues gour [3] parlées au nord, et les langues kwa parlées au sud. Les deux groupes sont rattachés à la famille linguistique nigéro-congolaise [4]. Parmi toutes ces langues, on distingue l’éwé [5], le kabyè [6], le tem [7], le moba [8], le peul. [9]Deux de ces langues sont reconnues comme langues nationales du pays [10] depuis 1975: l’éwé, qui domine au sud du pays, et le kabyè, pratiqué surtout au nord.

La reconnaissance de ces deux langues contribue théoriquement à leur insertion dans le système éducatif du pays, car elles sont non seulement parlées mais aussi écrites. Elles occupent toutefois une fonction relative car elles sont reléguées au rang de matières facultatives dans le système éducatif, et ce à partir du cours secondaire.

De plus, elles ne sont pas enseignées sur l’ensemble du territoire, et ne sont pas utilisées pour enseigner d’autres disciplines. En effet, malgré des déclarations d’intention fréquentes, comme ce symposium sur l’introduction du bilinguisme dans l’enseignement [11] tenu en juillet 2022 au cours duquel les autorités togolaises manifestent leur volonté d’introduire l’enseignement en langue éwé dans la région Maritime au sud du pays, et en Kabyè dans la région de la Kara au nord du pays, les enfants togolais ont rarement la possibilité de suivre des cours de langues nationales autres que le français.

Une mosaïque linguistique qui complique l’enseignement des langues

La situation n’est pas la même si on compare l’éwé et le kabyè. Le sud est plus homogène linguistiquement parlant, et la grande majorité des habitants parle l’éwé à la maison et dans la rue. Au nord, le kabyè ne domine pas le paysage linguistique de façon aussi marquée du fait de la réticence d’autres ethnies de cette partie du territoire à l’apprendre au détriment de leurs langues locales.

Dans une parution, le site icilome [11] pose les clefs du débat:

(…)Le kabyè et l’éwé étaient enseignés comme deuxième voire troisième langue, respectivement au nord et au sud du pays. Sans aucune réussite notable. Si l’éwé constitue la lingua franca dont l’enseignement était accepté sans conteste par la majorité des citoyens au sud, l’enseignement du kabyè l’était moins au nord, qui a un paysage sociolinguistique beaucoup plus varié(…)

Dans un post sur sa page Facebook, la plateforme Veille Citoyenne Togo [12], une organisation de la société civile togolaise, revient sur cette volonté des autorités en ce qui concerne l’enseignement de ces deux langues:

L’enseignement des langues nationales à l’école.
La réforme de l’enseignement au Togo en 1975 a introduit l’enseignement du kabyè et l’éwe dans les écoles publiques sur toute l’étendue du territoire national. L’enseignement de ces 2 langues était dans le but de renforcer l’unité nationale.
47 ans après, il est important d’apporter des améliorations à cette réforme parce que l’unité nationale ne saurait se faire avec 2 langues nationales.
Au Togo, il existe plus de 50 langues locales, mais chaque région a une langue dominante.
Il serait donc nécessaire, et dans le souci de l’unité nationale d’enseigner la langue dominante d’une région dans toutes les écoles publiques de ladite région.
En effet, le moba, qui est la langue dominante dans la région des savanes, doit être enseigné uniquement à tous les élèves inscrits dans les écoles publiques et privées dans cette région.
Le tem, qui est la langue dominante dans la région Centrale, doit être enseigné aux élèves de toutes les écoles publiques et privées dans cette région.
Par ces 2 exemples concrets, l’éwe et le kabyè doivent être respectivement enseignés dans la région Maritime et dans la région de la Kara.
Au Ghana, ce système a été adopté pour préserver l’unité nationale du pays.
Par ailleurs, dans le souci de l’unité nationale, il faut introduire une réforme qui modifie la loi qui fait de l’éwe et du kabyè les 2 langues nationales. Il faut élargir cette liste à 5 langues nationales correspondant aux 5 régions du Togo.
Le moba, le tem et l’ouatchi doivent être ajoutés à la liste des langues nationales au Togo.
À la télévision nationale et dans les médias publics, le journal en langue nationale doit se faire dans les 5 langues nationales cités ci-dessus.

Les commentaires sous ce post démontrent à suffisance la divergence des uns et des autres par rapport à la position des autorités.

Le digital au secours de l’enseignement de l’éwé

Un élément essentiel est en train de changer la donne : l’usage répandu des smartphones et l’accès à l’internet. Ainsi, la digitalisation de l’enseignement et de la pratique des langues locales devient une réalité.

Cette vidéo de TV5Monde [14] montre comment le smartphone est introduit comme support pédagogique grâce à une application développée au Togo et introduite dans certaines écoles :

Dans le contexte togolais, on peut citer l’exemple de Roger Mawulolo Lasmothey [15], un Togolais vivant au Sénégal, blogueur et passionné de cette langue. Il est l’initiateur de cours en ligne en langue éwe.

Sur son compte Facebook [16], il donne des indications pour apprendre cette langue, comme le montre cette capture d’écran :

Sur son compte Twitter, il explique le terme indépendance dans cette langue locale :

Ces initiatives lui ont valu des nominations à des prix nationaux, comme la cinquième édition de Togo Top Impact [23], un évènement qui récompense les acteurs togolais qui ont impact grâce à leur engagement.

Une autre initiative est l’enseignement de la langue éwé, initié par Sena Gameli sur son compte YouTube [30]. Sena est un jeune togolais qui est né et a grandi en France mais qui veut rester proche de ses racines africaines.

Ici, une vidéo de ses leçons sur sa chaîne YouTube :

Il a ainsi permis à plusieurs personnes d’avoir des notions de bases tant à l’oral qu’à l’écrit. Des commentaires sous cette vidéo témoignent de son apport à l’apprentissage de cette langue auprès des Togolais de la diaspora. Selon des estimations de 2016, la diaspora togolaise [31] compte 1,5 à 2 millions de personnes dont 80% réside dans des pays africains comme le Ghana, le Nigéria, la Côte d’Ivoire, le Bénin, le Burkina Faso, et en Europe, principalement en Allemagne, France, Italie et Belgique.

Ces initiatives linguistiques en ligne démontrent un véritable appétit pour l’apprentissage et la pratique en ligne. La balle est désormais dans le camp du gouvernement qui devrait accélérer les moyens pour un enseignement moderne et efficace en ces langues.

Article publié sur Global Voices en Français: https://fr.globalvoices.org

URL de l’article : https://fr.globalvoices.org/2023/05/05/278779/

URLs dans ce post :

[1] YouTube de Sena Gameli: https://www.youtube.com/watch?v=qvDWzybR3dY

[2] 53 langues: https://fr.wikipedia.org/wiki/Togo#Langues

[3] les langues gour: https://fr.wikipedia.org/wiki/Langues_gour

[4] nigéro-congolaise: https://fr.wikipedia.org/wiki/Langues_nig%C3%A9ro-congolaises

[5] éwé: https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89w%C3%A9_(langue)

[6] kabyè: https://fr.wikipedia.org/wiki/Kabiy%C3%A8_(langue)

[7] tem: https://fr.wikipedia.org/wiki/Tem_(langue)

[8] moba: https://fr.wikipedia.org/wiki/Moba_(langue)

[9] peul. : https://fr.wikipedia.org/wiki/Peul

[10] sont reconnues comme langues nationales du pays: https://assemblee-nationale.tg/wp-content/uploads/2021/05/constitution-consolidee-derniere-version.pdf

[11] symposium sur l’introduction du bilinguisme dans l’enseignement: https://icilome.com/2022/07/togo-enseignement-dans-les-langues-maternelles-kabye-au-nord-ewe-au-sud/

[12] plateforme Veille Citoyenne Togo: https://www.facebook.com/TogoVeille/posts/971372454261751/?paipv=0&eav=AfbcOOUcLdsIYvYa0vndcbR_cNU7PLIl4Bv_OmQAIHckhRGes_v-Br6qsTZ7tEERkFU&_rdr

[13] #VeilleCitoyenneTogo: https://www.facebook.com/hashtag/veillecitoyennetogo?__eep__=6&__cft__%5B0%5D=AZWz5GxYGDrmHsjs3dEZmZvQwp3d51fN2Nw9_JwLPI0bZ8o4lo_sZFew8yVZneIYzG5PeBw6jf65-b27CJR8CAren1xPC7ASNYn-SkaNv1kRLZEZtUz6Rh6ok8QZ9GV0buA&__tn__=*NK-R

[14] TV5Monde: https://www.youtube.com/watch?v=Yk0AjKB-vN8

[15] Roger Mawulolo Lasmothey: https://twitter.com/RogerLAS

[16] Facebook: https://m.facebook.com/mawulolo.las?eav=AfYIO40pdeZ4_7VNdt1QADMLB3-U7jD4utHhxCnkVwuw2LYxzEhJfMEhwnFyFKe0gm4&paipv=0

[17] https://t.co/yzZD0GDlNg: https://t.co/yzZD0GDlNg

[18] #ewe: https://twitter.com/hashtag/ewe?src=hash&ref_src=twsrc%5Etfw

[19] #tɔɖiamawulolo: https://twitter.com/hashtag/t%C9%94%C9%96iamawulolo?src=hash&ref_src=twsrc%5Etfw

[20] #Blog228: https://twitter.com/hashtag/Blog228?src=hash&ref_src=twsrc%5Etfw

[21] pic.twitter.com/R9McECXzcj: https://t.co/R9McECXzcj

[22] April 27, 2023: https://twitter.com/Blog228/status/1651548924178575361?ref_src=twsrc%5Etfw

[23] Togo Top Impact: https://twitter.com/TogoTopImpact?s=20

[24] @DidierKissode: https://twitter.com/DidierKissode?ref_src=twsrc%5Etfw

[25] #TgTwittos: https://twitter.com/hashtag/TgTwittos?src=hash&ref_src=twsrc%5Etfw

[26] @TogoTopImpact: https://twitter.com/TogoTopImpact?ref_src=twsrc%5Etfw

[27] #Togo: https://twitter.com/hashtag/Togo?src=hash&ref_src=twsrc%5Etfw

[28] pic.twitter.com/yNduZ0DWH1: https://t.co/yNduZ0DWH1

[29] January 18, 2023: https://twitter.com/leTogoRT/status/1615648703070572553?ref_src=twsrc%5Etfw

[30] Sena Gameli sur son compte YouTube: https://www.youtube.com/@Mawuakpe

[31] diaspora togolaise: https://publications.iom.int/fr/books/migration-au-togo-profil-national-2015

Captura de pantalla del videoclip de ‘Cuba primero [1],’ con los cantantes Linier Mesa y Dianelys Alfonso ‘La Diosa’

Escrito por Luis Rodriguez

Este artículo fue escrito por un@ autor@ en Cuba bajo el seudónimo de Luis Rodriguez.

Si fuéramos a describir el panorama social en Cuba hoy en día, por muy optimista que quisiera ser, realmente es desesperanzador. La isla y sus habitantes viven en un estado emocional y psíquico desgastador. Desde el 2020 a la actualidad los analistas coinciden [2] en que la sociedad cubana atraviesa la crisis más grande desde el colapso de la URSS, con una inflación sin precedentes, dolarización de la economía, desabastecimiento, escasez de medicamentos, interminables apagones, aumento de la inseguridad y la desigualdad social, y lo peor, la represión [3] sistemática que ha emprendido el régimen contra todo aquel que se manifieste.

En medio de esa oscuridad afloran luces que matizan el panorama, impregnándole un clímax más esperanzador gracias al activismo que en los últimos años han venido ejerciendo los artistas tanto en Cuba como en la diáspora cubana en EE.UU, que alzan su voz en nombre de los millones de cubanos a los cuales el régimen les niega el derecho más básico de expresarse libremente.

Precisamente del talento de artistas han salido canciones que tienen un carácter movilizador. No olvidemos el tema musical Ya viene llegando de Willy Chirino que hizo bailar a millones de cubanos [4] durante aquellos duros años noventa. La letra de Willy Chirino se convirtió en un himno para esos balseros [5]que arriesgaban sus vidas intentado alcanzar las costas de la Florida. En la actualidad muchos se emocionan cuando la escuchan. Luego llegó el tema que estremeció a Cuba y fue el símbolo del estallido social del 11 julio 2021 [6]Patria y vida [7], realizado por artistas y miembros del Movimiento San Isidro, como Luis Manuel Otero [8], que siguen encarcelados [9] hoy en día. En Cuba, gritar «patria y vida» te puede llevar a la cárcel.

Cuando pareciera que las voces de los artistas se encontraban apagadas, los cantantes Linier Mesa y Dianelys Alfonso, conocida como La Diosa, ambos exiliados en EE.UU, estrenaron el 16 de abril en Miami el tema Cuba primero, con gran impacto en Cuba. El videoclip aborda hechos históricos del país con una dimensión simbólica que refuerza su carga emocional latente en cada plano, como la operación Peter Pan [10] en 1959 hasta la crisis de los balseros en 1994.

Una vez más un tema musical asume el papel del activismo social y político similar al desempeñado por Patria y vida dos años atrás, pero a diferencia del anterior que estimuló a los cubanos a protestar, cuya consecuencia ha sido la existencia de más de mil presos políticos [11], Cuba primero lanzó un llamado a los artistas tanto en Cuba como en la diáspora a alzar su voz en representación de muchos cubanos que sufren en silencio. Es un momento de gran polarización entre los artistas cubanos, algunos han optado por la complicidad con el régimen y otros por criticar al sistema imperante en la isla. En esencia, resulta difícil para cualquier artista cubano asumir un rol de neutralidad.

En ese sentido Cuba primero no solo es una canción de denuncia, también es un llamado a salir de nuestra zona de confort y pasividad tanto como ser humano que como artista, incluyendo a los intelectuales, a pronunciarnos por la tragedia cotidiana que se ha convertido la vida de los cubanos en una isla vista como una inmensa cárcel; desde ese principio el silencio también es una forma de complicidad.

Ese activismo y su poder movilizador pueden ser una chispa en ese polvorín que se ha convertido la sociedad cubana, sobre todo los jóvenes que consumen contenido audiovisual en las redes y en YouTube. Esto constituye una gran preocupación para los ideólogos del régimen y sus voceros, como a Michel Torres Corona, conductor del espacio Con filo, considerado por algunos activistas cubanos como el dramaturgo Yunior García como el programa «más detestable [12]» por sus continuos ataques a activistas y opositores. En uno de sus más recientes programas Torres Corona atacó [13] el videoclip Cuba primero, cuestionando el uso de determinadas simbologías como el tiburón para representar a Fidel Castro.

Aunque puede ser capaz de movilizar la sociedad civil, las circunstancias actuales son otras que las que vieron las protestas del 2021 [14]. Lo que sí es un denominador común es la guerra de símbolos que se libra entre la narrativa del régimen y la producción cultural de la diáspora.

Desde el clásico musical Ya vienen llegando pasando por Patria y vida hasta Cuba primero, son una muestra que los vínculos culturales entre la isla y sus coterráneos en la diáspora está cada vez más conectado por un consenso: la total y definitiva liberación del pueblo cubano del totalitarismo.

En medio de ese túnel oscuro, los cubanos no solo sufren en silencio sino que también cantan y bailan al ritmo de letras que los convocan a conquistar esa anhelada libertad.

Si desean escuchar más música de protesta cubana, vea esta playlist elaborada por Global Voices en Spotify:

 

Artículo publicado en Global Voices en Españolhttps://es.globalvoices.org

URL del artículo: https://es.globalvoices.org/2023/04/28/esta-nueva-cancion-cubana-espera-un-renacer-artistico-de-protesta-en-la-isla/

URLs en este posteo:

[1] Cuba primero: https://www.youtube.com/watch?v=UJ0Lbffd5BE

[2] coinciden: https://theconversation.com/cuba-sufre-el-mayor-exodo-ante-su-peor-crisis-desde-el-colapso-de-la-urss-200237

[3] represión: https://www.amnesty.org/es/location/americas/central-america-and-the-caribbean/cuba/report-cuba/

[4] hizo bailar a millones de cubanos: https://es.globalvoices.org/2021/12/01/himnos-populares-y-prohibidos-en-cuba/

[5] balseros : https://es.wikipedia.org/wiki/Balsero

[6] 11 julio 2021: https://es.globalvoices.org/2020/12/02/entre-terror-policial-y-difamacion-cubanos-luchan-para-poder-expresarse-libremente/

[7] Patria y vida: https://es.globalvoices.org/2021/04/16/con-canciones-redes-sociales-y-huelgas-de-hambre-artistas-cubanos-luchan-contra-la-represion/

[8] Luis Manuel Otero: https://es.globalvoices.org/2021/05/11/quien-es-luis-manuel-otero-simbolo-de-resistencia-y-piedra-en-el-zapato-del-regimen-cubano/

[9] encarcelados: https://www.bbc.com/mundo/noticias-america-latina-61933344

[10] operación Peter Pan: https://es.wikipedia.org/wiki/Operaci%C3%B3n_Peter_Pan

[11] más de mil presos políticos: https://www.infobae.com/america/america-latina/2023/03/13/prisoners-defenders-denuncio-que-hay-mas-de-mil-presos-politicos-en-cuba/

[12] más detestable: https://www.cibercuba.com/noticias/2022-07-29-u208347-e208347-s27061-yunior-garcia-critica-filo-programa-detestable-television

[13] atacó: https://www.youtube.com/watch?v=u5J1WohYadw

[14] las protestas del 2021: https://es.globalvoices.org/2021/07/14/desde-cuba-con-vpn/

 

Volver al hebreo era recuperar el idioma de los antepasados en la tierra natal que ellos habitaron y cuya pertenencia se quería reclamar. La lengua resucitada sirvió para movilizar apoyos a una conciencia nacionalista que ya existía

Portada del tercer volumen de la edición de la Biblia en hebreo y ladino publicada en Viena (1813-1816).

Escrito por Lola Pons Rodríguez

En fotos, Jerusalén me llama la atención por su arquitectura blanca homogénea. Es una ciudad que roza el millón de habitantes: la parte oeste es habitada por judíos, la parte este por árabes. Bajo el meleke, esa piedra caliza blanquecina que da su aspecto a la Ciudadela de David o al Muro de las Lamentaciones, todo parece unitario. La engañosa unidad cromática del horizonte cae sobre la capital de un país que está enconado en la gestión del territorio. La Explanada de las Mezquitas (Al Aqsa) se ha convertido esta semana en el centro de la última contienda.

El meleke, esa piedra de Jerusalén, tiene una virtud constructiva: se cincela con facilidad y luego, expuesta a la atmósfera, se endurece y se hace sólida. Es exactamente lo mismo que les ocurre a las lenguas: están al arbitrio de los hablantes, y, por encima de ellos, están sujetas a decisiones políticas que intentan moldearlas, regulando cómo, dónde y cuánto deben hablarse. Al aire público de la calle, en la conversación cotidiana, si esas decisiones políticas son aceptadas por los hablantes, triunfan y se hacen sólidas, cobran apariencia de decisión consensuada y natural. Estas regulaciones entran dentro de lo que en la Lingüística llamamos “planificación lingüística”, pero que socialmente y con toda justicia se llama también política lingüística. Que una determinada política lingüística triunfe o no está en manos de la sociedad que habla la lengua en cuestión.

Lo que se habla en Israel dice mucho de lo que ocurre en Israel. El hebreo es la lengua que hoy se habla en el Parlamento de Israel, la que usan sus ciudadanos judíos, la que se enseña en los colegios y la que conocen también, en buena medida, los palestinos. El hebreo, lengua semítica, tiene una larga historia, pero dejó de hablarse de forma viva en el siglo III. Siguió usándose desde entonces restringida a la liturgia y, desde el siglo XVIII, en algunos textos literarios. No era una lengua empleada cotidianamente; las comunidades judías de la Palestina del siglo XIX hablaban distintas lenguas: el árabe, el sefardí o el yiddish, una lengua de raíz germánica.

Esa lengua hebrea que hoy es lengua oficial de Israel se reimplanta como lengua hablada por la voluntad y convicción del ruso Eliezer Ben-Yehuda (1858-1922). Ben-Yehuda sostenía que la lengua podría ser un elemento de cohesión para los judíos que estaban en la diáspora; fortalece en su etapa universitaria en París su conocimiento del hebreo y, primero en Argelia y luego en Palestina, se esfuerza en propagar el uso del idioma como lengua viva. Incluso hace un experimento en su propia familia: cría a su hijo desde su nacimiento exclusivamente en hebreo y lo convierte así en el primer hablante nativo de hebreo moderno.

La planificación lingüística empezó, como se ve, desde casa, pero paulatinamente fue ganando adeptos. Recuperar el hebreo supuso buscar nombres para objetos que no tenían nombre en el hebreo litúrgico, obligó a modernizar la lengua. Y así la lengua se cincelaba y fortalecía: desde 1898 hubo instrucción oficial en hebreo en las escuelas judías de Palestina y en 1953 se funda la Academia de la Lengua Hebrea. El proceso se parece al de otras lenguas recuperadas en el siglo XX, aunque aquí se partía de que la mayoría de los judíos (al menos, los varones) habían recibido educación religiosa en el hebreo escrito, por lo que conocían la lengua.

Volver al hebreo tenía una función simbólica, era recuperar el idioma de los antepasados en la tierra natal que ellos habitaron y cuya pertenencia se quería reclamar. La lengua resucitada sirvió para movilizar apoyos a una conciencia nacionalista que ya existía, pero no era solo un ideal soñador, porque normalmente la planificación lingüística no es solo lingüística: promover el hebreo era también rebajar el peso del yiddishmuy empleado en las comunidades judías de la Europa oriental, y distinguía a los nuevos colonos de los ya establecidos en Palestina, ante los que se reivindicaba un liderazgo nuevo y joven.

La lengua es de los hablantes, sí, pero su uso en entornos de poder, la selección de las lenguas en que se debe enseñar o traducir no son decisiones inmediatas de ellos sino de quienes los gobiernan. Ese hebreo que hoy nos parece una lengua más del mundo y que es la lengua oficial del Estado de Israel era, hace un siglo, el idioma que hablaban cotidianamente en casa solo diez familias judías.

El forjado de una lengua común ha sido uno de los elementos que ha dado un color lingüístico de cohesión y homogeneidad a las distintas comunidades judías de Israel. Pero ellos no son los únicos habitantes de ese territorio: en el mapa lingüístico faltan los palestinos, hablantes del árabe palestino, también residentes en la ciudad de la piedra blanca donde hoy se empieza a oír el runrún de amenaza de una cuarta intifada. La primera intifada, por cierto, la de 1987, se llamó “la guerra de las piedras”.

 

Lola Pons Rodríguez, filóloga e historiadora de la lengua; trabaja como catedrática en la Universidad de Sevilla. Dirige proyectos de investigación sobre paisaje lingüístico y sobre castellano antiguo; es autora de ‘Una lengua muy muy larga’, ‘El árbol de la lengua’ y ‘El español es un mundo’. Colabora en La SER y Canal Sur Radio.

 

 

[Foto: YAEL MACÍAS – fuente: http://www.elpais.com]

Sholem Aleikhem fut, en son temps, le plus célèbre des écrivains de langue yiddish. À sa mort à New York, son enterrement vit défiler des milliers de personnes. Un cortège de rock star, digne de l’amour que lui portaient les Juifs de la diaspora, à lui et à ses personnages.

Sholem Aleichem en 1907

Avec :
  • Jean Baumgarten, directeur de recherche au CNRS, enseignant au Centre de Recherches Historiques (EHESS), ses travaux portent sur la littérature yiddish et l’histoire culturelle du monde ashkénaze
  • Gilles Rozier, éditeur et écrivain
  • Akvile Grigoraviciute, bibliothécaire à la Maison de la culture yiddish
  • Nadia Déhan-Rostchild, traductrice
  • Yitskhok Niborski, vice-président de la Maison de la culture yiddish
  • Jacques Mandelbaum, journaliste, critique cinématographique
  • Jean-Claude Grumberg, dramaturge, écrivain.

Par Mathilde Wagman. Réalisation : Gislaine David. Attachée de production : Claire Poinsignon. Avec la collaboration d’Annelise Signoret

Né en 1859 dans une petite ville de l’Empire tsariste, Sholem Aleikhem – de son vrai nom Sholem Rabinovitch – grandit dans une famille juive religieuse, mais suffisamment ouverte pour qu’il bénéficie d’un enseignement au lycée, en russe. Engagé comme précepteur, il tombe amoureux de la fille de son patron, se fait renvoyer mais réussit quand même à l’épouser. À la mort de son beau-père, il se retrouve à la tête d’une petite fortune, qu’il va s’empresser d’engloutir dans la création d’une maison d’édition d’œuvres en yiddish. C’est que le petit Sholem Rabinovitch a découvert très tôt, dès le Heder, l’école traditionnelle juive, qu’il aime faire une chose : écrire. « Vous savez que je suis toujours prêt à écrire, même sur la pointe d’une aiguille ou sur le tranchant d’un sabre ! », confie-t-il à un ami en 1904. Rapidement, il parvint à vivre de sa plume, grâce à la presse yiddish qui se développe alors et devint avide de ses feuilletons.

Dans ses histoires, Sholem Aleikhem décrit le monde qui l’a vu naître. Kasrilevké, le shtetl imaginaire qui fait la toile de fond de nombreuses nouvelles, est inspiré du village où il a grandi. Tévié le laitier, qui a pour seul bien son cheval et ses sept filles, est un homme qu’il a connu enfant. Les tribulations de Menahem Mendl, le Luftmensch, l’« homme de l’air », rêveur qui croit toujours à la possibilité de faire fortune, sept fois à terre, huit fois debout, évoquent les mésaventures de l’auteur, qui fit lui aussi faillite pour cause d’investissement hasardeux. L’errance du personnage, d’Est en Ouest, d’Odessa à New York, est aussi celle de son auteur, qui fuit la vague de pogroms du début du XXè siècle pour tenter sa chance ailleurs. À Genève, à Londres, puis à New York, où il fut accueilli comme une célébrité, le « Mark Twain juif », comme le lui dit, raconte-t-on, Twain himself.

Ce qui fit, sans doute, la renommée de Sholem Aleikhem, ce sont ces personnages qui, quelles que soient les innombrables vicissitudes de l’existence, ne cessent jamais de se relever. La saveur de ses récits tient à ce ton indéfinissable, où rire et larmes, ironie et tendresse sont toujours indéfectiblement mêlés. Le Luftmensch, c’est Sholem Aleikhem lui-même, rêveur et homme de l’air, qui écrit pour mieux nous aider à respirer.

Liens

Biographie de Cholem Aleichem dans l’Encyclopédie des Juifs d’Europe de l’Est

Voyage dans Le monde fantastique de Cholem Aleichem, avec le journal La Croix

De Sholem Aleichem à Charlie Chaplin, de Menahem Mendl au personnage de Charlot… Un article de Morgane Jourdren publié sur le site de l’ENS de Lyon

Saison Cholem Aleichem, proposée par La Maison de la culture yiddish, à l’occasion du centième anniversaire de sa mort

L’éloge du récit: Nikolaj Leskov et Sholem Aleikhem, article de Catherine Géry, professeur à l’Inalco

https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/une-vie-une-oeuvre/sholem-aleichem-le-luftmensch-1859-1916-1787457

[Source : http://www.radiofrance.fr]

Preto de 200 galegos xuntáronse esta fin de semana en Bruxelas

Escrito por LAURA PLACER

Cando o centro galego de Bruxelas pechou as portas no 2019 os emigrados quedaron practicamente sen espazo para celebrar as súas raíces. Iria lémbrao con pena. Os seus avós emigraron e ela xa naceu e viviu toda a vida en Bélxica. Pero ninguén podería dicilo. Fala galego e baila muiñeira como se crecera en Galicia. Ese vencello ca súa cultura levouna a formar parte das preto de 200 persoas que esta fin de semana se xuntaron en Bruxelas co gallo do EmigraSon. Ata as actividades se achegaron emigrados afincados en Bruxelas pero tamén galegos que viaxaron ex profeso para o festival. Detrás deste proxecto están cinco rapaces morriñentos —Mateo, María, Karan, Gara e Cris— que, sen máis pretensión que facer unha xuntanza de galegos emigrados, organizaron dúas xornadas de actividades na capital da Unión Europea sen ánimo de lucro.

Ata Bruxelas viaxaron gaitas, pandeiretas, guitarras e óboes para reivindicar que a cultura galega é variada e interesa tamén fora das fronteiras propias. Isto quedou patente co ambiente que se respiraba en cada un dos tres espectáculos que conformaron a programación da fin de semana.

O venres Celso Fernández e Benxamín Otero deron o disparo de saída cun espectáculo de música e oralidade no Instituto Cervantes. Non había mellor forma de empezar que cas súas historias de vida e morte, de emigración e de cotío. A súa divertida e conmovedora presentación dou paso a unha foliada a cargo do grupo Xirandola, do Deza. As gaitas puxeron a bailar a un local tan ateigado de galegos que case non se podía nin bailar unha muiñeira.

O prato forte chegou o sábado co festival de música que xuntou a cinco grupos galegos: Filloas, Berto, Fillas de Cassandra, The Rapants e Familia Caamagno. Toda a sala vibrou durante seis horas con ritmos que fluíron dende os sons urbanos de Filloas ata o rock The Rapants pasando pola tradición-fusión de Fillas de Cassandra.

Mateo, Karan, María, Cris e Gara, organizadores do EmigraSon

Mateo, Karan, María, Cris e Gara, organizadores do EmigraSon

Tres xornadas de celebración da galeguidade que foi todo un éxito para público, grupos e organización. Para Sabela, unha das asistentes que viaxou desde Galicia para ver o festival e visitar a cidade, pareceulle «moi bonito ver como se materializa unha idea tola dun grupo de emigrados que ademáis chega a tanta xente». Esta gratitude por parte dos asistentes fai que dende a organización pensen que «mereceu a pena todo o esforzo», como comenta Karan. «Queríamos que quedara a xente contenta e penso que o conseguimos», afirma con voz alegre pero cansa despois de tres días de máximo trafego. A fatiga non o bota atrás e xa está pensando nunha posible segunda edición sempre que atopen financiamento. Esta primeira edición do EmigraSon foi difícil nese aspecto aínda que finalmente puido saír adiante grazas ao apoio dos europarlamentarios galegos Nicolás Casares (PSOE) e Ana Miranda (BNG). Esta última afirma sentirse «honrada de acompañar a creatividade galega, a músicos con tanto talento que ás veces non teñen tantas oportunidades», e espera que isto sexa un precedente. Tamén pensan o mesmo os grupos. The Rapants non esperaban un convite así. «Cando nos dixeron que querían que foramos a Bruxelas estoupounos a cabeza, pensamos, se se da, é unha das experiencias da vida», comentan. «O que máis mola é que traian aquí a nosa cultura. Esperemos que esta iniciativa dure moitos anos e que sirva de exemplo a seguir para outros proxectos», conclúen.

 

 

[Imaxe: Pablo Vázquez – fonte: http://www.lavozdegalicia.es]

El idioma ídish tuvo una breve época de gloria en las últimas décadas del siglo XIX y primeras del XX. Tras casi un milenio de existencia de esta lengua, de pronto el judaísmo europeo desató una oleada de talento en su propia “jerga”, que se expresó primero en la literatura y el teatro, y más adelante en la música popular y el cine.

Los tres pilares de la literatura ídish fueron Shalom Abramovitch (con el seudónimo de Méndele Móijer Sfórim), Itzjak Leibush Péretz y el más popular de todos Shalom Aleijem, llamado “el maestro de la risa judía”.

Escrito por Sami Rozenbaum, director del NMI

Nació con el nombre de Sholem Rabinovich en Pereyaslav, provincia de Poltava del Imperio Ruso (actual territorio de Ucrania), el 2 de marzo de 1859. Fue el tercer hijo de Menajem Nahum Rabinovich y Jaie Ester Zelding. Se trataba de una familia acomodada, religiosa pero sumergida en la cultura universal y aficionada a la literatura de la Haskalá (Iluminismo o Ilustración judía). Sin embargo, poco después su padre fracasó en los negocios y la familia se vio reducida a difíciles condiciones económicas.

Sholem fue criado en el shtetl (pequeña aldea mayoritariamente judía) de Boronkov. Desde pequeño demostró una gran capacidad de observación e imitación de los vecinos que veía en el shtetl, que más adelante lo inspirarían para crear sus personajes. Después regresó a Pereyaslav, donde cursó el gymnasium (bachillerato).

Cuando tenía 13 años, su madre murió en una epidemia de cólera; su padre contrajo nuevo matrimonio con una mujer de mal carácter, Jane, muy dada a insultar y maldecir a todos sus hijastros. Sholem elaboró un detallado glosario de estas expresiones, que le sería muy útil en su vida literaria; mucho después, Jane fue uno de los personajes más destacados de su autobiografía. También por aquella época el joven leyó la novela Robinson Crusoe, y escribió una versión en que imaginaba que el protagonista era judío.

Sin embargo, impulsado por su padre, Sholem continuó sus estudios religiosos. A los 21 años ejerció brevemente como rabino designado por el gobierno en el pueblo de Lubny, donde trabajó por apoyar a los más pobres.

NACIMIENTO DE UN ESCRITOR

Ya desde adolescente, Sholem trabajó como maestro particular de idioma ruso; así conoció a Olga Loiev, hija de un importante hombre de negocios, con quien contraería matrimonio en 1883, contra los deseos de este.

Por esas fechas abandonó su trabajo como rabino y comenzó a enviar sus primeros artículos en hebreo a los diarios Hatzefirá y Hamelitz, y en ídish en el Idishes Folksblat de San Petersburgo, donde publicó su primer cuento basado en su noviazgo con Olga, Tzvéi Shtéiner (“Dos piedras”); este trabajo lo firmó como Shalom Aleijem, saludo hebreo que significa “La paz sea con ustedes”, aunque en el uso común quería decir más bien “¿Cómo te va?”. Al parecer empleó el seudónimo para ocultar su identidad de la familia, sobre todo de su padre; en aquella época el ídish aún no era muy bien visto en los medios intelectuales judíos, por lo que fueron muy comunes los seudónimos. En poco tiempo, Shalom Aleijem se volvió popular gracias a sus trabajos en el Idishes Folksblat.

Eran días de decepción para la juventud judía rusa: tras un período de apertura en el país, durante el cual muchos habían apostado por asimilarse a la cultura general y entraron por miles a las universidades, tras el asesinato del zar Alejandro II comenzó una serie de pogromos. Unos cuantos de los decepcionados decidieron marcharse a Palestina para reconstruir el hogar ancestral; pero la mayoría optó por concentrarse en desarrollar su propia cultura judía como minoría nacional dentro del imperio.

Shalom Aleijem se radicó en Bielozerkov, en la provincia de Kiev. Al fallecer su suegro heredó su fortuna, le tocó administrar sus bienes y volvió a disponer de recursos para una vida acomodada; sacaba tiempo de su trabajo en el comercio, la bolsa y los seguros para hacer lo que realmente le interesaba: escribir. En esta época publicó varias novelas, cuentos, crítica literaria, seriados y poemas, no solo en ídish sino también en hebreo y ruso.

En 1888, uno de sus años más productivos, Shalom Aleijem editó, con sus propios fondos, un anuario de literatura ídish titulado Di Idische Folksbibliotek, con el cual buscaba elevar el nivel de respetabilidad de la lengua y promocionar a sus nuevos autores. Este anuario causó gran revuelo, y fue un elemento fundamental en la consolidación de la “alta cultura” ídish.

Ese mismo año, Shalom Aleijem publicó su novela Sender Blanc y su familia, donde dio muestras de un estilo humorístico que incorporaba la crítica social. A diferencia de I. L. Peretz y Méndele Móijer Sfórim, su tono no era satírico ni psicológico; el humor lo acercaba a los lectores.

Una de sus creaciones imperecederas fue “Kasrílevke”, un shtetl imaginario que reunía peripecias y personajes que podían identificarse en cualquier shtetl. La mayoría de sus historias tendrían lugar allí, aunque también inventó las aldeas de Anatevka y Bóiberik, y la gran ciudad de Yejúpets. Los habitantes de los shtetls mostraban, en sus palabras, “la capacidad para soportar, sobrellevar y sobrevivir a toda suerte de calamidades que la vida y los hombres les acarrea. Sin embargo, por muy dolorida que esté, la gente del shtetl no pierde la jovialidad, la sonrisa, el chiste, la broma para endulzar los amargos infortunios”.

El shtetl de Shalom Aleijem, a diferencia de la imagen que habían creado otros escritores, no es un lugar estancado; en medio de la pobreza y el barro sus habitantes se “mueven”, emprenden nuevos proyectos y, sobre todo, piensan en salir al gran mundo. Las historias de Kasrílevke son, en cierta forma, cíclicas. Los personajes atraviesan inicialmente momentos buenos; luego ocurre alguna “catástrofe” grande o pequeña, todo parece desmoronarse, pero al final hay un renacimiento, un resurgir. Es el ciclo de vida del judío de la diáspora.

Muchas de las historias de Shalom Aleijem están narradas en primera persona por sus protagonistas, en forma de cartas o monólogos. Casi siempre se publicaban por entregas y después se recopilaron en forma de libros, de los cuales se editaron unos 40 en total. En algunos casos estos seriados duraron más de 20 años, prácticamente hasta la muerte del autor.

PERSONAJES MEMORABLES

En 1890, Shalom Aleijem editó el segundo anuario de literatura ídish; pero ese año la fortuna dejó de sonreírle una vez más, al perder todos sus ahorros en la bolsa. Se marchó de Rusia y residió por breve tiempo en París, Viena y Chérnovitz, antes de reunirse con su familia en Odessa, cuando su suegra pagó sus deudas.

Esta fue la época más dura para Shalom Aleijem, en la cual escribió mucho menos. Sin embargo, dio vida a dos personajes inmortales: Menájem Mendl y Tevie el lechero, verdaderos arquetipos del judío del shtetl.

Menájem Mendl es un hombre pobre en lo material y lo intelectual, pero siempre lleno de grandes planes y fantasías, de las que habla todo el tiempo buscando convencer a los demás. Predeciblemente sus planes fracasan, arrastrando con ellos a sus desventurados “socios”; pero Menájem Mendl “se vuelve a levantar y comienza de nuevo a edificar castillos en el aire”, como escribe Samuel Rollansky, biógrafo de Shalom Aleijem. La esposa de Menájem, Sheine Shéindl, tiene que soportar las interminables quimeras de su marido, ese bribón ingenuo que genera una simpatía irresistible.

El estilo humorístico de Shalom Aleijem esconde con frecuencia la crítica social. Un ejemplo es el cuento Tres cabecitas, que describe a tres hermanitos pequeños que viven en un minúsculo apartamento en la ciudad, en medio de la miseria. El mayorcito ya va al jéder (escuela de primeras letras), por lo que los otros dos, un niño y una niña, lo admiran. Él les cuenta sobre las cosas que ve y aprende, dejándolos maravillados, como cuando les habla de grandes edificios llenos de ventanas, máquinas que cosen solas y cómo crecen los árboles. Porque los más pequeños no salen nunca del minúsculo hogar; solo pueden mirar por la ventana mientras su padre trabaja armando cajas, y su madre cocina y limpia.

“UNA SOLA VENTANA, MINÚSCULA, QUE SE DISPUTABAN LAS TRES CABECITAS. ¿QUÉ VEÍAN POR LA VENTANA? UNA PARED; UNA PARED ALTA, ANCHA, GRIS, HÚMEDA, PERMANENTEMENTE HÚMEDA. HASTA EN VERANO. ¿Y EL SOL? ¿LLEGABA EL SOL? SÍ, DESDE LUEGO, LLEGABA A VECES. NO PRECISAMENTE EL SOL, SINO SU REFLEJO. EN ESAS OCASIONES, VERDADEROS MOMENTOS DE FIESTA, LAS TRES BELLAS CABECITAS SE LANZABAN A LA VENTANA, ALZABAN LA VISTA, MIRABAN HACIA ARRIBA, BIEN ARRIBA. VEÍAN UNA CINTA AZUL, UNA FRANJA AZUL, LARGA Y ANGOSTA”.

No sorprende que algunos críticos hayan llamado a Shalom Aleijem “el Charles Dickens judío”.

Pero el personaje más célebre de Shalom Aleijem es el entrañable Tevie el lechero. En palabras de Rollansky, “Tevie es el hombre del pueblo, trabajador, que ama al mundo, a los hombres y a todos los seres vivos que pueblan la Tierra. Vive una existencia plagada de sufrimientos, pero no se queja de nadie. Todo lo acepta con una sonrisa en los labios. Lo habrá dispuesto el destino… Tevie no puede odiar, ni siquiera a sus enemigos. Y enemigos los tiene, aunque no sabe por qué. Sus vecinos gentiles, con quienes convivió toda la vida en pacífica armonía, lo expulsan de la aldea y desbaratan su hogar. Todos ellos, no obstante, aseguran que Tevie es un buen hombre ‘aunque sea judío’”…

Las historias de Tevie pintan un fresco de la vida del shtetl en la dramática transición de finales del siglo XIX y principios del XX: hijas que escogen sus propios esposos, ideas políticas revolucionarias, pogromos, sionismo, la emigración a América. Tevie lo enfrenta todo empleando frases de los textos sagrados, que cita e interpreta en una forma muy personal. Discute con Dios, se enoja con él, luego lo perdona y sigue adelante. Tevie es el pueblo judío en toda su universalidad.

No sorprende que los cuentos de Tevie el lechero, en una selección titulada El violinista sobre el tejado, hayan podido adaptarse al teatro musical y el cine con un éxito resonante.

LOS GOLPES DE LA VIDA

En 1903 se produjo el terrible pogromo en Kishinev, en la actual Moldavia, donde murieron decenas de judíos y cientos de familias perdieron sus hogares. Esto sacudió profundamente a Shalom Aleijem, quien organizó la edición de un libro a beneficio de las víctimas y sus familias titulado Auxilio: una antología para la literatura y el arte, que se editó en Varsovia en 1904. En esta gran obra colaboraron entre otros León Tolstoi —con quien Shalom Aleijem mantenía correspondencia—, Anton Chéjov y otros grandes literatos rusos. Otras de sus amistades fueron los poetas Máximo Gorki y Jaim Najman Bialik.

Pero en 1905 el terror lo tocó más de cerca: en el propio Kiev, donde vivía, se produjo un pogromo antijudío a raíz de la Primera Revolución Rusa. Shalom Aleijem y su familia decidieron trasladarse a Estados Unidos, adonde llegaron con dificultad en 1906, tras pasar por ciudades como Lémberg (Lwow), Amberes y Londres. Las dificultades burocráticas que tuvo que enfrentar las plasmó en una serie que había comenzado a escribir poco antes: Mótel, el hijo del cantor Peise.

Mótel es un niño de 8 años que queda huérfano. Su madre y hermano venden todos los muebles y demás posesiones para reunir dinero y marcharse a América. En el largo periplo, durante el cual atraviesan buena parte de Europa, los acompaña un amigo de su hermano, Piñe, un intelectual excéntrico que siempre tiene los bolsillos llenos de papelitos con notas, apasionado por la libertad y modernidad que encontrarán en Estados Unidos, donde todos los judíos viven bien…

A este grupo de emigrantes se van añadiendo por el camino otros miembros de su familia extendida y conocidos de Kasrílevke. Porque en Mótel, el hijo del cantor Peise, el shtetl se disuelve, se disgrega, huye definitivamente del viejo mundo que tan mal lo ha tratado. La última parte de la serie transcurre en Nueva York, donde los emigrantes descubren que las cosas no son tan fáciles, pero son libres y siempre existe la posibilidad de nuevos comienzos.

LA INMORTALIDAD

A pesar de la cálida bienvenida que recibió en Nueva York, Shalom Aleijem no logró sostenerse económicamente y regresó decepcionado a Europa. Había enfermado de tuberculosis durante uno de sus viajes por Rusia; desde entonces pasó largas temporadas postrado en cama, pero no abandonó el trabajo. Esta convalecencia le impidió asistir a la primera Conferencia Internacional de la Lengua Ídish, celebrada en Chernovitz en 1908.

Shalom Aleijem volvió a escribir con profusión, lo cual le resultaba imprescindible para sostenerse económicamente. A pesar de su popularidad, sus trabajos solo enriquecían a los editores y favorecían a los dueños de la creciente cantidad de periódicos ídish de Europa y Norteamérica. También comenzó a hacer lecturas de sus obras, que atrajeron a un numeroso público en una época en que se hablaba ídish en todas partes. Escribió algunas obras de teatro que, aunque con distinto éxito, se representaron en Alemania, Francia, Estados Unidos y otros países.

En 1914, al estallar la Primera Guerra Mundial, emprendió de nuevo viaje a Estados Unidos con su familia, y volvió a radicarse en Nueva York. Allí falleció el 13 de mayo de 1916. Mótel, el hijo del cantor Peise quedó inconcluso, así como su autobiografía, Funem yarid (“Desde la feria”).

Activo sionista

Además de su dedicación a la narrativa, Shalom Aleijem fue también un apasionado sionista. En la década de 1880 se había afiliado al movimiento Jibat Zion (Amantes de Sión), para el cual escribió varios folletos propagandísticos. En 1897, a raíz del Primer Congreso Sionista, fue autor del influyente opúsculo ¿Por qué necesitan los judíos un país? También escribió una “novela sionista”, Los tiempos del Mesías (1898). Más tarde, en 1907, fungiría como representante de los judíos neoyorquinos en el Congreso Sionista celebrado en La Haya.

A pesar de su sionismo, estaba de acuerdo con los “bundistas” (militantes de la cultura y la organización sindical judía en Europa) en que el ídish debía ser un idioma nacional de los judíos.*

*Véase el dossier “Los judíos y las luchas laborales”, en NMI Nº 1830: http://bit.ly/1QYGF95

Las crónicas de la época señalan que al conocerse la noticia de su fallecimiento casi todos los establecimientos judíos de Nueva York cerraron sus puertas. El velorio duró dos días, y cientos de miles de personas acompañaron los restos del escritor al cementerio de Brooklyn.

“Quiero que mi nombre se recuerde con risa, o no se recuerde”, escribió en su testamento. Él mismo no imaginó cuán recordado sería. En Israel, Estados Unidos y Europa Occidental sus obras no han dejado de editarse durante el siglo trascurrido. En la Unión Soviética, incluso bajo el estalinismo, se le consideró un defensor de los campesinos y proletarios, y sus trabajos circularon por millones de ejemplares en varios de los idiomas de ese imperio. Tras la desintegración de la URSS han aparecido monumentos, calles, escuelas, monedas y estampillas con su nombre en Rusia, Ucrania, Rumania, Lituania y Birobidyán, así como en Israel, Estados Unidos, Australia, Argentina y muchos otros países.

Shalom Aleijem se convirtió en sinónimo de la literatura ídish, y a la vez en el escritor judío más universal de los tiempos modernos. Con su humor marcó el auge y declive del shtetl, ese universo rico, dinámico y profundo que pronto desaparecería en la vorágine de la historia.

Fuentes:

  • Eduardo Weinfeld, compilador (1957). Literatura ídish. México: Editorial Enciclopedia Judaica Castellana, serie Tesoros del Judaísmo.
  • Encyclopaedia Judaica, volumen 14 (1971). Jerusalén-Nueva York: The MacMillan Company.
  • Samuel Rollansky (1966). Schólem Aléijem, la sonrisa de la vida judía. Buenos Aires: Biblioteca Popular Judía.
  • Shalom Aleijem (1968). Cuentos de niños. Buenos Aires: Acervo Cultural Editores.

 

[Reproducido en nmidigital.com]

Mezcla de documental y ficción, este film argentino se centra en el viaje de los directores al Este de Europa a buscar intérpretes actuales de la música klezmer y conocer más acerca de su historia.

Escrito por Diego Lerer

«Una lengua es un dialecto con un ejército detrás». Algo así dice la frase que abre esta curiosa película, mezcla de documental, autoficción y ficción. La expresión puede sonar lejana a lo que uno supone que verá, pero de a poco ADENTRO MIO ESTOY BAILANDO (THE KLEZMER PROJECT) irá yendo hacia ese terreno, llevando su propuesta inicial (una investigación sobre la historia y el presente de la música klezmer) hacia escenarios un poco más amplios en lo temático. Un dialecto, una música, una cultura que se pierde es una que no ha tenido un territorio que la cobije, un ejército que la defienda o que fue obligada a una diáspora tan enorme que se hizo muy difícil sostenerla.

La película de Koch y Schachmann son varias en una, una suerte de puesta en abismo que empieza por un lado y termina en otro, que apuesta por un formato y se va yendo a otro, que combina tres o cuatro hilos narrativos paralelos y cruzados en prácticamente todas sus escenas. La parte «documental» (va esto entre comillas porque parece tener muchos elementos de autoficción) arranca con Leandro, uno de los directores, filmando bandas y solistas de música klezmer para un proyecto sobre el tema. En una boda judía conoce a Paloma, la codirectora, que toca el clarinete en una banda de este estilo. Los dos conectan rápidamente y ella le comenta que viajará al Este de Europa a visitar a un famoso músico estadounidense que estudia la historia del klezmer. Más interesado en seguir a la chica que en cuestiones estrictamente musicales, Koch decide viajar después y buscarla.

La película seguirá más que nada su recorrido. Koch empieza filmando giras y show (entre los que se escucha a la dupla argentina Lerner & Moguillevsky) y luego se va yendo hacia el Este. Primero a Viena, donde con la ayuda del realizador austríaco radicado en Argentina Lukas Rinner, consigue financiación para un documental más periodístico e informativo sobre la música klezmer para la TV de ese país. Y con él marcha a Ucrania, Rumania y Moldavia tratando de encontrar intérpretes de una música que fue desapareciendo del mapa (a causa del exterminio del pueblo judío durante la Segunda Guerra o por la posterior migración a Israel) y que hoy casi nadie practica.

El recorrido trata de combinar varios ejes a la vez, demasiados quizás. Está el análisis musical, que trata de entender qué sobrevive de esa música en otros géneros folclóricos de la zona. Está el citado comentario histórico, que liga también lo que pasó con la música klezmer con la creciente desaparición del idioma ídishe, que fue siendo dejado de lado por nuevas generaciones judías más conectadas con el hebreo e Israel. Está el ¿falso? documental sobre la película que no consiguen hacer y el dinero que se les acaba. Está la complicada historia de amor entre los codirectores, manejada con cartas y mensajes. Está el retrato amoroso de los pueblerinos de todos los lugares por los que ellos pasan con sus consiguientes números musicales. Y, englobándolo todo, una intermitente voz en off en ídishe que lee historias del pasado judío en los pueblos de esa zona de lo que antes se conocía como Besarabia.

Cándido, humanista, inteligente y visualmente bello –especialmente en su parte ucraniana, rumana y moldava–, ADENTRO MIO ESTOY BAILANDO propone una búsqueda hacia la cuna de la dispersa identidad judía de parte de los realizadores, que usan como excusa la música en cuestión. Eso se nota en los textos familiares que son leídos y en esa búsqueda un tanto frustrante de tratar de encontrar las raíces precisas de una historia que se extiende por varias generaciones. Puede no encontrarse la referencia exacta, el lugar, el idioma o la persona buscada, pero el aire está habitado por esos fantasmas del pasado.

La variedad de formatos y giros casi a modo de collage que proponen los realizadores por momentos conspira contra su potencia. Los textos leídos en ídishe –quizás el único problema real de la película– son difíciles de seguir, ya que compiten por nuestra atención con imágenes y situaciones que no tienen que ver con lo que se dice, salvo metafóricamente. Y por momentos la propia película parece saltar de un lado a otro, dejar de lado cosas y no retomarlas, como alguien que va descubriendo qué película quiere hacer mientras la edita, una road movie que lo siguió siendo una vez terminado el viaje.

Lo más curioso de todo es que, aun con esas imperfecciones (o quizás gracias a ellas), ADENTRO MIO… termina siendo muy representativa de ese espíritu curioso, pero un poco perdido con el que los descendientes de inmigrantes judíos a la Argentina tratamos de entender o capturar las experiencias de nuestros padres y abuelos. Hemos escuchado las historias, el lenguaje y las canciones –mi madre solía cantar una que se escucha en la película–, hemos imaginado los escenarios por donde pasaron nuestros antepasados y lo que tuvieron que vivir, pero no tenemos muy en claro cómo ni dónde encontrar esos lugares, esas músicas, esas historias. No hay una casa familiar, un terruño al que regresar como les sucede a muchos hijos o nietos de inmigrantes españoles o italianos: todo aquello fue violentado, destruido, aniquilado. Lo que queda es un aire de familia que, como pasa con los dialectos perdidos, está en todas partes y a la vez en ningún lado.

 

[Fuente: http://www.micropsiacine.com]

 

C’est le grand roman de la rentrée littéraire d’hiver : Femmes sur fond blanc, de Jean-Noël Orengo, Prix de Flore 2015. Le déclin de l’Occident d’une part, hymne à l’amour du Sud-Est asiatique d’autre part. Âme sensible, s’abstenir.

Jean-Noël Orengo

Propos recueillis par Vincent Jaury

C’est un torrent de boue et d’amour. Côté boue : l’Occident, la bourgeoisie progressiste, le Woke, la collective dépression, bref, l’Occident, pour Orengo, c’est le déclin, c’est la poubelle, c’est la pourriture ; côté amour : l’Asie du Sud-Est, la Thaïlande, les prostitués du pays, les ladybars, les ladyboys, les Belles de Bars, les punters, les hookers, les Américains, etc. des paysages à la culture ancestrale, un éden, un fantasme, l’art en beaucoup plus fort.

Le torrent ? C’est son style, qui jamais ne languit, qui toujours va de l’avant, à une vitesse et un muscle stupéfiant. Son baroquisme est un ouragan, il vous emporte loin de chez nous. Chez nous ? le pays de Descartes, du classicisme, de la ligne claire, de la tenue, de la retenue, de la rétention. C’est une plongée à forte prolifération à laquelle nous invite Jean-Noël Orengo avec Femmes sur fond blanc. Une plongée thaïlandaise où les lois n’en sont pas, où les blancs sont immoraux, où les prostituées apparaissent comme des déesses venimeuses et alléchantes. C’est une littérature de l’excès, du grand débordement. Une radicalité de perception comme cette pensée sur la vie, sans clair-obscur : « Dessiner ou peindre un cerveau, c’est montrer d’un côté le camp de concentration, de l’autre le film pornographique. Ce sont les deux vrais lobes continentaux de cet organe, et nous oscillons sans cesse de l’un à l’autre. C’est ce qui nous unifie en un seul peuple, c’est ce qui fait de nous des frères et des sœurs quels que soient nos peaux, nos histoires, nos croyances, nos lieux : d’un côté le camp de concentration où l’on torture les êtres qui nous déplaisent ; de l’autre le film pornographique où l’on couche avec ceux qui nous subjuguent. Les gens dans la rue, les inconnus ou les familiers, soit on les désire, soit on les détruit ; soit on les aime, soit on les hait ; soit on les baise, soit on les tue. »

Vous aimez ce passage ? Vous aimerez ce livre. Vous trouvez ça too much ? Passez-votre chemin, ce livre vous brûlera les mains.

L’histoire est une chronique ; celle de Paul Gauguin, peintre contemporain qui vit pour l’art, pour l’Asie, pour les jeunes filles. Il peint, il baise, il contemple. Il peint des jeunes filles, des muses, des inspirations divines, a de sublimes élans créateurs. Le retour à Paris en 2019 fait mal. Il organise une dernière exposition en galerie, mais tout a changé ici : l’art est devenu moral ; l’art est sous étroite surveillance. Le déclin est là, avant tout là.

À lire ce roman, il n’y a pas à dire « c’est bien ou ce n’est pas bien », un lecteur doit suspendre son jugement moral. On est bien heureux qu’un écrivain nous décrive de l’existant, des hommes et des femmes vivants d’aujourd’hui ; on est bien heureux de les voir de près, ces putes, ces mecs qui s’enfuient de France parce qu’ils n’en peuvent plus de leur vie ratée ; on est bien heureux de suivre donc, de près, de très près ce Paul Gauguin à Bangkok, cet esthète de la fange, du crade, de la souillure, du sacré, du beau et de l’extase. Les sentiments nobles abondent dans la littérature française contemporaine. Il est nécessaire d’aller voir du côté de l’honteux, de l’avilissant, de l’inavouable. Nos vies ne sont-elles pas toutes, traversées par de l’ignoble ? Ce miroir fracturé que nous tend Orengo est salvateur ; l’humaine condition se rééquilibre l’instant de la lecture du livre. Nous sommes des humanistes, des gens bien, mais des salops aussi. C’est ce que nous rappelle avec brio un des grands écrivains français d’aujourd’hui.

Entretien avec Jean-Noël Orengo

Vincent Jaury : Pourquoi avoir appelé votre personnage principal Paul Gauguin, comme le célèbre peintre de la fin du XIXe siècle ?

Jean-Noël Orengo : Mais c’est réellement Paul Gauguin ! Je crois que si l’on pense activement à une figure, elle renaît. On peut lire ce roman comme une uchronie en histoire de l’art. Mais c’est autant une réincarnation. Un retour à la carne, la chair. Paul Gauguin ne naît plus en 1848 mais en 1968. Sa vie se déroule entre ce qu’on appelle la révolution sexuelle et la cancel culture, car le roman s’arrête en 2020, au moment du confinement mondial. Il vit en Thaïlande depuis 1995, comme Gauguin s’est installé en Polynésie. Son univers est moins spatial que temporel : c’est la Nuit Thaïlandaise. Je cape, car c’est un nom propre et royal, une sorte de règne ou de dynastie, comme on dirait le Haut Empire, ou bien les Valois. Et dans cette Nuit Thaïlandaise, il y a une aristocratie de rue, une armée de prostituées, de putes, comme on les nomme. Personnellement, je ne les appelle plus ainsi. J’euphémise, j’hyperbolise sans complexe, je blase à l’humeur et aux sentiments. C’est mon côté politiquement ou sexuellement correct. Je les appelle filles ou femmes de la nuit, danseuses, belles de bar, princesses de sang contaminé, mais surtout et d’abord par leur prénom : Tippawan, Chanya, Porn… Leur métier, leur art, leurs peines, leur martyre, leurs joies, leurs fêtes sont indicibles, sauf quand je commence par prononcer Chanya, Tippawan, Porn, et alors se déroulent en rouleaux, en paravents, leurs histoires réelles que je connais bien pour les avoir vécues et entendues. Tippawan, Chanya, Porn… Des milliers de noms brillant de significations labyrinthiques, car ainsi sont les noms thaïs qu’ils conservent affleurante, leur étymologie, tandis que les nôtres, c’est plus abstrait, il faut creuser pour savoir que Lucien vient de lumière par exemple. Et donc mon Gauguin a subi le silence et la haine comme le Paul Gauguin des manuels né en 1848. Car voilà l’une des origines de ce livre : depuis 2017, Paul Gauguin est devenu le symbole de « l’homme blanc fétichisant la femme non-blanche », le symbole de l’artiste criminel se « réappropriant » une région du monde, la Polynésie et par extension les Tropiques, pour en faire son obsession. Et comme il a épousé Tehura, treize ans, il est devenu pour une certaine presse et certains courants dominants, le meanstream universitaire et médiatique, l’archétype du « touriste sexuel pédophile blanc » – manque de bol aujourd’hui, l’écrasante majorité des « touristes sexuels » en Asie du Sud-Est sont indiens, chinois, coréens et japonais –, dont l’art est un alibi pour sa délinquance. Par exemple, le New York Times a titré Is time Got Canceled à propos d’une série d’expositions en Amérique du Nord et en Angleterre durant l’année 2019. En 2017, c’est le magazine Jeune Afrique qui a lancé les hostilités à propos du film Gauguin – Voyage de Tahiti, avec Vincent Cassel et Tuheï Adams, en titrant La pédophilie est moins grave sous les tropiques. Le meanstream, la bourgeoisie universitaire et médiatique le considère ainsi. Ce fut pour moi un sujet de choix mais insuffisant. C’est certes un sujet de choix que la bourgeoisie actuelle, qui a troqué le Christianisme frelaté du XIXe pour le Progressisme et ses prétendues valeurs « inclusives », se focalise sur un artiste mort en 1903, et réduise son œuvre aux circonstances de sa vie. Tehura, personne ne se souviendrait d’elle si Gauguin ne l’avait pas peinte et dite dans Noa Noa, peinte et dite avec amour et respect dans ses toiles et ses pages. Mais c’est insuffisant. La polémique Gauguin s’est vite révélée superficielle, un simple effet de surface par rapport aux histoires à raconter. Si Gauguin est un archétype de quelque chose, c’est celui de l’individu fuyant son continent de naissance, disons l’Europe moderne, l’Europe industrielle et positiviste de la fin du XIXe siècle pour un « ailleurs », qui n’avait de sens que pour lui, certes, l’Européen moderne. Mais ça pourrait concerner n’importe quel être de n’importe quel continent se rendant dans un autre. C’est une illusion constructive, et non une déconstruction illusoire. C’est une quête, un rapport sentimental extrême à la géographie, et à un point précis de celle-ci à l’exclusion des autres. C’est une oscillation sentimentale extrême entre son lieu de naissance, que l’on subit, et celui de sa renaissance, que l’on désire et prémédite. Je ne dis pas que tout le monde l’éprouve, je dis que certains d’entre nous l’éprouvent et que c’est inexplicable, ça se vit, ça se sent. Ce sont d’extrêmes sensations. Gauguin haïssait – car c’est bien de haine qu’il s’agit – son lieu de naissance, pour aimer – car c’est bien d’amour qu’il s’agit – un lieu lointain. Cela n’a rien de positiviste, de rationnel, de réductible à une explication sociologique, ou économique, ou sociale, et encore moins « racialiste », pour parler le contemporain. Gauguin pour moi, c’est devenu comme Stendhal et Œdipe, c’est le nom d’un syndrome, d’un complexe. Quelle chance de donner son nom à une maladie parlant d’amour et de géographie ! Syndrome de Gauguin, et j’espère un jour, après ma mort, car je suis très ambitieux, et j’ai l’impression que je serai un auteur post-mortem, vu les ventes et la mise en place en librairie, syndrome d’Orengo ! J’espère rejoindre cette famille des grands malades de l’amour et de la géographie. C’est pas faute d’essayer !

VJ : De quel milieu vient votre Paul Gauguin ?

JNO : Aux États-Unis, on appelle ça les White Trash, les Rednecks. Mon Gauguin vient de là parce que j’en viens moi-même. Les sociologues parlent de « milieux populaires », Karl Marx de lumpen-prolétariat… En fait, peu importe le nom, le concept, la notion. Je n’y ai jamais totalement crû. Cette conceptualisation participe d’une manière de penser qui m’est étrangère. Et puis ces « classes populaires », ce lumpen-prolétariat, ce sont des zones floues. Et elles sont plus exaltantes que les cellules Excel où l’on trimbale les gens actuellement, par exemple à travers ces oppositions stupides dominant/dominé. C’est très petit-bourgeois de réfléchir de cette manière. Et la France est devenue un grand pays petit-bourgeois, avec une littérature pour centre-ville petite-bourgeoise. Et il faut admettre qu’elle devient universelle, cette petite-bourgeoisie. Dominant/Dominé, Blanc/Non-Blanc… On dirait Bouvard et Pécuchet faisant de la sociologie. La lutte des classes mérite mieux que cet embourgeoisement conceptuel de la lecture sociale. Donc oui, mon Gauguin vient de là, d’une famille très forte parce que dehors, il n’y a rien qui vaille, et qu’au-delà des arrières-grands-parents, la mémoire familiale se perd, les racines n’existent pas, c’est un univers de légende, et Dieu vaut mieux que les sciences, encore plus lorsqu’elles se prétendent « humaines ». Il vient de là et donc du néant social. Socialement il n’est rien, mais par l’adoption et la diaspora, il deviendra tout. Il se sent élu par la peinture, il se veut ou se sait peintre, il adopte la peinture et la figure de peintre, car il est peintre avant d’être qui que ce soit d’autre. Il vient de là au fond. Il vient de l’Art, c’est un anonyme au service d’un flux gigantesque, d’un mouvement sans mesure possible qui se nomme l’Art. On est au début des années 1990, et durant plusieurs années, il se forme auprès de gens pour qui l’art, la musique électronique et l’homosexualité fusionnent dans un quotidien très nocturne, à base d’errance d’un atelier à un bar, d’un bar à un club, d’un club à des pissotières de gare, des jardins publics, des sexshops avec leurs sous-sols remplis de cabines aux parois percées de glory hole. Il évolue là-dedans parce que j’ai moi-même évolué là-dedans. L’art, la musique électronique et le monde gay m’ont éduqué, ce sont les trois chapitres de mon bildungsroman. Ce sont des cadences, des rythmes, une sorte de versification de l’existence à base de rencontres, d’instants vécus sous l’angle de L’Épiphanie joycienne où la création et le sexe – l’amour – procurent des sensations similaires et se nourrissent l’une l’autre. Je suis hétéro, le corps masculin ne m’attire pas, le corps féminin totalement, le corps masculin m’attire donc quand il cesse d’être tel, quand il se fait opérer pour devenir une femme, mais le mode de vie homo de ces époques, totalement asocial, irréductible au mariage et au quotidien des hétéros, m’est apparu comme l’image même d’une existence au service de l’art, qui a besoin de cette rudesse, de cette solitude pour s’épanouir. L’Asie du Sud-Est offre à tout le monde, hétéro ou homo, ce qu’un sauna n’offre que de manière partielle, fermée, minuscule, à une certaine catégorie d’hommes. C’est une vie morale, une éthique monacale, car très solitaire. Le corps d’autrui est une matière première. Il y a une matière fille, une matière féminine faite de toutes les femmes possibles, femmes natives ou transsexuelles, quelle que soit leur physiologie, et de cette matière première peut surgir une œuvre, des œuvres. Vivre son hétérosexualité comme un homo. Et l’Asie du Sud-Est, avec tous ces êtres disponibles, pour qui la vie n’est qu’une parmi d’autres prises dans le Samsara, le cycle des renaissances innombrables dont on se libère peu à peu, est le territoire bien réel de ce mode de vie, de cet art existentiel de l’instant et de la rencontre à haute dose, dans l’anonymat et la réinvention de soi, de Bangkok à Manille, Pattaya, Phnom Penh, etc. Et bien sûr, très vite, un conflit surgit entre cette solitude et la volonté de faire durer l’instant avec quelqu’un comme soi, quelqu’un d’instable. Une femme boussole et une seule, qui devient le repère de cette errance. Voilà d’où vient Gauguin, ce qu’il est et où il va. C’est un flux et non un point d’origine et un point d’arrivée.

VJ : Pourquoi avoir choisi un peintre comme personnage principal, et non un écrivain, un cinéaste ou autre ?

JNO : Jusqu’à mes vingt-cinq ans à peu près, j’ai tenté de devenir peintre. Peintre dans le sens contemporain du mot. Ça ne passait donc pas forcément par de la peinture, même si je peignais. Je dessinais encore plus. J’ai échoué. Je n’avais pas le talent nécessaire et la croyance en soi nécessaire pour y arriver. Je parle ici de peinture au sens très large du terme, cette peinture pouvant inclure la sculpture, l’objet, les trois dimensions, l’installation, le film, le son… Cette peinture-là, peinte sur toile dans la plus pure tradition ou peinte à coups de caméras et d’objets singuliers, incarne l’art majeur pour moi. Certains de mes projets sont passés dans le livre. Celui de l’horloge filmique par exemple, une caméra – ou plusieurs – tournant sur elle-même chaque seconde dans un lieu, avec le résultat projeté sur un mur de ce lieu. Peut-être arriverais-je un jour à réaliser cette installation ? Imaginez ça dans une gare, un aéroport, avec tous ces passages ? C’est un doux rêve, une illusion qui me console parfois. Je dessine encore, je vais parfois faire des nus à la Grande Chaumière… C’est une activité que je ne montre jamais. Donc évidemment, de ce point de vue-là, mon Gauguin est un double vengeur de mon ratage. Il est un avatar possible du jeune homme que j’étais.

VJ : Pourquoi avoir tenu coûte que coûte, malgré les problèmes que ça peut vous poser dans notre époque où la police de la pensée surveille et punit à tour de bras, que la fille peinte par votre personnage principal, soit mineure ?

JNO : Parce que le vrai Paul Gauguin a épousé Teha’amana, aussi appelé Tehura, lorsqu’elle avait treize ans. En 2017, la polémique à propos du film Gauguin – Voyage de Tahiti, a éclaté parce que Tuheï Adams, l’actrice jouant Tehura, n’avait manifestement pas treize ans, qu’elle était une jeune femme dans sa vingtaine, et qu’ainsi on trafiquait la réalité historique. On réécrivait l’histoire, exactement comme lorsqu’on veut supprimer certains mots des romans du passé, parce qu’ils sont injurieux. C’est passionnant, car là, c’est la presse progressiste qui a reproché au film de ne pas montrer une fille de treize ans avec un type de quarante-trois ans. Les contradictions sont toujours passionnantes. Je suis moi aussi contradictoire, en ceci que je sépare l’homme de l’œuvre. L’homme et ses crimes appartiennent à la justice, et l’œuvre, il faut la laisser libre, quelle que soit l’œuvre, et le référent de l’œuvre – adolescente, fille de treize ans, tueurs en série, journées à Sodome, prospérité du vice, etc. L’œuvre est asociale, surtout dans l’Occident moderne, positiviste, dénuée de valeurs transcendantes permettant d’incarner l’œuvre dans un Vatican ou une pyramide. L’œuvre est seule, libre, et elle explore un territoire asocial où les pulsions se répandent et s’épanouissent. L’œuvre est irréductible à la morale sociale, politique ou que sais-je. Sa morale est ailleurs et indéfinissable. Mon Gauguin par exemple, il assassinerait bien l’homme pédophile Tony Duvert si jamais un membre de sa famille devait être touché par ce genre d’individu. Mais il laissera toujours libre son œuvre, car elle est superbe. C’est une œuvre honnête, radicale et donc morale selon l’art, et à rebours de toute société. Mon Gauguin considère la pédophilie comme une déviance criminelle incurable qu’il faut traiter par la justice, quelle qu’elle soit, justice par l’État, et quand l’État est mou, justice par les familles. Son père dans le livre, appelle ça l’autodéfense illimitée. Il adhère à ça, il est plein de pulsions meurtrières défensives. C’est un pur White Trash, sa morale est sanguine, sanguinolente, brutale et belle car sanguine et sanguinolente au service des siens, une chair à vif contre la chair criminelle qui se croit tout permis. Oui, c’est un Charles Bronson, un Harry Callahan en plus développé, plus radical, plus beau car pas du tout cliché. C’est un croisé, un enfant de la colère de Dieu, un djihadiste absolu. Et c’est un personnage, ok ?, un sacré personnage, ce père animal majestueux ! Donc, j’ai respecté cette histoire de Tehura, et mon Gauguin rencontre Tippawan, une danseuse, une belle de bar de treize ans. Elle a treize ans, pas plus, elle se prostitue dans les clubs de Bangkok, elle sait tout de la vie et lui ne sait rien, c’est un ignorant et il l’écoute et il apprend. Il apprend d’abord une langue, une religion, un quotidien. Cette histoire, je l’ai nourrie de mes propres rencontres avec des femmes de la nuit thaïe d’une certaine génération. J’ai rencontré beaucoup de ces femmes, âgées alors d’une cinquantaine, quarantaine, parfois d’une trentaine d’années, qui me racontaient leur début, une époque que je n’ai pas connue, les années 1970-1990, quand leurs familles vendaient leur virginité à des maquerelles, qui elles-mêmes les vendaient à des Chinois, parfois des Japonais. Elles passaient plusieurs jours avec eux. J’ignore pourquoi il ne s’agissait en grande majorité que de chinois. Mais c’était ainsi. Ce sont des récits insurpassables, inimaginables, qui ne se rapprochent que d’autres récits liés aux guerres, aux pogroms. Elles le disaient sur tous les tons. Elles en parlaient parfois comme une expérience liée à un être mort il y a longtemps, avec une distance terrible. Elles avaient tué la jeune fille de douze ou treize ans qu’elles étaient. Écouter ça renforce votre pessimisme, votre misanthropie, votre désir d’autodéfense meurtrière devant le reste des hommes, et en même temps votre amour. Ces femmes étaient devenues mères malgré tout, avaient été ou étaient très amoureuses, et entrepreneuses, elles avaient vaincu. Oui, elles avaient vaincu et le mot victime était une injure à leur endroit. Certaines avaient perdu par contre. Certaines avaient le sida, et elles avaient vaincu leur passé tout en étant sous médocs à jamais, quand elles avaient survécu. Certaines n’avaient rien vaincu du tout. Mais certaines avaient réellement vaincu, et elles resplendissaient dans leur mariage, leur bar dont elles étaient propriétaires. Ces histoires sont stridentes, modulées, pleines de sentiments contradictoires extrêmes. Elles sont non linéaires, non réductibles à des idéologies doloristes et victimaires, pas plus qu’à des saloperies du genre « on peut guérir de tout, on peut être plus fort que les événements, etc. » Ce sont des histoires extrêmes et elles sont les seules histoires qui m’interpellent.

VJ : Avec un livre pareil, vous êtes sûr de ne pas être invité à la matinale de France inter !

JNO : C’est dommage alors. On aurait un passionnant débat sur l’art, sa dimension asociale, et la prostitution, et les questions de couleurs de peau dans les relations amoureuses, et sur l’hypocrisie. Mais c’est comme ils veulent. Up to youcomme on dit dans les nuits d’Asie du Sud-Est. Et puis, la fois où je suis passé sur France Inter, dans l’émission d’Augustin Trapenard, ça s’est très bien passé.

VJ : Il y a une place importante laissée dans votre roman à ce qu’est l’argent, dans son rapport à l’amour mais aussi à l’art. Vous avez cette phrase, prononcée par Paul Gauguin, p.21 « L’argent est ce qui rend l’art plus intéressant que l’argent »…

JNO : L’amour et l’argent, leurs liens, ça aussi c’est insurpassable. Avoir une grosse somme de cash dans les poches et la dépenser d’un coup, en une nuit. L’argent cash, la beauté du cash. La laideur absolue de l’argent, sa beauté soudaine, quand on le possède entre ses mains. Rien n’égale ce moment où tu donnes une liasse de billets, un bijou, une bague hors de prix à quelqu’un, et que dans cette action passe toute la sexualité, toute la vie possible, toute l’horreur et toute la joie. Idem quand tu reçois. Une femme tirant sa carte bleue, son chéquier pour te payer tes vêtements, tes restaurants, ton appartement, c’est splendide, ça prélude à l’amour physique le plus puissant, c’est une parade qui se suffit à elle-même, tu te sens fort, tu te sens faible, tu as envie de tuer, tu as envie de baiser, c’est une montagne russe, c’est la contraction dans le corps, la grande rhétorique et ses fleurs de style en plein bide. L’argent est une denrée indispensable au corps humain. L’argent comme l’eau, l’argent comme le sang. Les riches le savent et ceux qui sont honnêtes l’assument, ils en jouissent et le dilapident avec les plus belles créatures de cette Terre. Les pauvres le savent et l’assument d’autant plus qu’ils en ont un besoin vital tout de suite et pas demain. Il n’y a que la bourgeoisie – grande, moyenne, petite, toute la bourgeoisie – pour posséder plus ou moins l’argent, et le convertir en argument pseudo-moral, soit en le critiquant, en cachant son importance et en prétendant l’abolir – c’est la nouvelle bourgeoisie progressiste –, soit en le justifiant par l’idée de travail. J’ai aimé les œuvres parlant et montrant ça. Le cinéma est meilleur que la littérature sur ces liens. Erich Von Stroheim, Joseph Von Sternberg, Jean Eustache parfois. Le muet noir et blanc est bourré de scènes de ce genre où l’argent et l’amour s’exaltent mutuellement. Les débuts du parlant aussi. Marlène Dietrich achetant une montre à son officier d’amant. Colette décrit ça sans cesse. L’argent, les jeunes mecs, les lesbiennes friquées. Je suis jaloux du cycle Dietrich/ Sternberg, jaloux de Chériet La Fin de chéri, jaloux de Von Stroheim et de Lulu d’Alan Berg. Depuis mon premier roman, l’amour et l’argent constituent deux valeurs, deux énergies, deux pulsions de mon écriture, et comme pour l’Asie du Sud-Est et les danseuses de la nuit, les prostituées, il en sera toujours ainsi. Donc oui, l’argent est ce qui rend l’art plus intéressant que l’argent. Ce paradoxe est une variation d’un aphorisme de l’artiste américain Robert Filliou, qui prétendait que « l’art est ce qui rend la vie plus intéressante que l’art. » Inutile de donner une explication précise à ce paradoxe.

VJ : Le roman est entre autres une réflexion sur l’art, avec cette pensée très forte que la vie est plus forte que l’art, au sens occidental du terme. La vie, c’est l’art. Vous pouvez nous éclairer sur cette question ?

JNO : Ça rejoint l’aphorisme précédent de Robert Filliou. C’est une vision des romantiques et des modernes et j’y adhère encore totalement. Je sais que Flaubert parlait d’être réglé dans sa vie et déréglé dans son œuvre – je n’ai plus la citation exacte en tête –, mais il avait du pognon et sa vie n’a pas été aussi réglée que ça. Je sais aussi qu’il n’y a pas de formule et que la littérature est d’une merveilleuse injustice : vous pouvez être un aventurier ou victime d’histoires atroces et écrire de mauvais livres, et vous pouvez être un individu sans histoires et sans relief, sans look ni personnalité, tout en couchant sur votre écran un texte somptueux. C’est injuste et c’est merveilleux que ce soit injuste, il n’y a pas de formule. En ce qui me concerne, l’art me permet de vivre librement le temps. Je me lève tôt et j’écris tous les jours, mais je pourrais me lever tard, et je me lève tard en Asie du Sud-Est. Je n’ai pas de patron. Je suis disponible à ce qui arrive. Partir, rester. C’est « up to me ». L’écriture, c’est la liberté absolue.

VJ : Il y a une colère contre l’Occident dans ce livre, pouvez-vous nous la décrire ?

JNO : Contre l’Occident moderne, l’Occident contemporain, oui. C’est sûr. Gauguin détestait l’Occident moderne, donc il fallait explorer cette dimension-là pleinement, qui est devenue très actuelle. Cette haine de l’Occident signe sa modernité. C’est ce qui définit l’Occidental moderne. Soit il se hait, soit il hait. Soit il extermine, soit il s’extermine lui-même et disparaît dans la culture de l’autre. C’est une pulsion qui dépasse le fait d’être réactionnaire ou révolutionnaire. Cette modernité occidentale est une maladie, une psychose. Nous en sommes tous atteints et elle est devenue planétaire. Peut-être un peu moins en Asie, trop ancienne, dont l’antiquité affleure toujours en Inde par exemple, pour être complètement infectée par cette psychose. Mais quand même, la haine de soi, la haine de l’autre, de plus en plus partout. Pour ma part, je m’appuie, j’essaie de m’appuyer à des temps plus anciens. Je me suis démodernisé intérieurement si vous voulez. Dans mon échelle de valeurs, le prétendu Moyen-Âge, c’est le Haut Christianisme. La prétendue Renaissance, le Moyen Christianisme. Et les âges modernes, le Bas Christianisme. En Occident, nous vivons dans le Bas Christianisme. C’est du bricolage intellectuel, mais qui vaut bien l’Histoire écrite par les profs. L’Occident moderne est pour moi la victoire de l’antiphrase sur la parole de Dieu, la parole spirituelle. La victoire du mensonge législatif sur la prière et le poème. C’est celle où l’on écrit la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen tandis que l’on guillotine en masse les gens. C’est celle qui parle de civilisation tandis qu’on colonise. C’est celle où l’on écrit « le travail rend libre » au fronton des camps de concentration, encore que là, c’est une métaphore pour signifier : le travail te rendra libre car il te tuera dans les pires souffrances. Et bien sûr, c’est la Shoah. Il se trouve que la Shoah, j’en ai entendu parler pour la première fois dans mes cours de catéchisme à Noisy-le-Grand, par des sœurs qui m’enseignaient la Bible, invitaient des survivants à témoigner, de même qu’elles accueillaient les enfants vietnamiens et cambodgiens. Je dois beaucoup à cette éducation par le texte et la rencontre.

VJ : Est-ce que Le déclin de l’Occident de Spengler est un de vos livres de chevet ?

JNO : Non, du tout, mais les œuvres complètes de Joseph de Maistre, oui. De même que celles de Leo Strauss. De même que la musique d’Arnold Schoenberg, qui est pour moi une figure tutélaire centrale. Il se voulait conservateur en politique et révolutionnaire en art. Si Spengler avait écrit Le déclin du Christianisme, là oui, je l’aurais lu plus volontiers. Ou Le déclin du judéo-christianisme, plus situé, plus digne de la Mitteleuropa, dont la disparition entre 1933 et 1945 signe la fin de l’Occident. Il n’y a plus d’Occident après la Shoah. Son esprit est moitié mort, moitié vivant. Quoi de plus zombi que la déconstruction, qui se nourrit de livres vivants pour les mortifier, au lieu d’écrire des livres neufs à partir de l’expérience vécue, en se souvenant que ce que nous expérimentons, d’autres l’ont expérimenté avant nous ? La déconstruction, c’est l’anti-commentaire talmudique, où l’interprétation grandit le texte. On ajoute de la vie à la vie. C’était ça, la Mitteleuropa, le Christianisme et le Judaïsme d’Europe. Et cet Occident moderne, cet Occident zombi, est devenu planétaire. Je me répète, mais en Asie, ça me semble moins présent qu’ailleurs. L’Asie sera peut-être l’héritière de la Mitteleuropa. Quoi qu’il en soit, il n’y a pas plus occidental moderne que le « décolonialisme », l’antiracisme, le néo-féminisme, la déconstruction. L’écologie ultra-libérale promue par l’Occident moderne, ce qu’on nomme la transition écologique, est en train de devenir planétaire. La galaxie Thunberg, c’est-à-dire, via Greta Thunberg, ses sponsors et les grands groupes agroalimentaires, formate une nouvelle génération de consommateurs, prête à dépenser plus pour des produits polluants et destructeurs à base d’éoliennes et de bagnoles électriques. Personnellement, mon écologie commence par la terre, l’agriculture biodynamique, où l’acte de cultiver est un acte spirituel utilisant des essences locales. Je préfère la biodynamie de Rudolf Steiner à n’importe quelle autre façon de cultiver. Autre lecture favorite : les passeports. Je n’oublie pas la chance que j’ai d’avoir un passeport français. Donc l’Occident moderne me gonfle, sauf quand il devient à son tour un territoire fantasmatique pour les Non-Occidentaux. L’attraction et la répulsion que suscite l’Occident me plaisent énormément. L’attraction et la répulsion sont elles aussi des matières premières pour l’Art. L’exotisme fonctionne dans les deux sens, la fétichisation, les passions dangereuses, obsessionnelles pour des couleurs différentes de la sienne. La répulsion entraîne une politisation et une moralisation stupides et passionnantes. Voir le mâle blanc hétérosexuel devenir l’ennemi historique n°1 est peut-être inquiétant d’un point de vue social et politique, mais franchement exaltant d’un point de vue esthétique, même si le mot écorche les délicats de l’art. Dans ma jeunesse, il n’y avait rien de plus plouc que le mâle hétéro et blanc, ils se cachaient, se travestissaient pour exister dans l’art. Maintenant, le mâle blanc hétéro est la figure transgressive par excellence. Je trouve ça super.

VJ : Il y a une cible que vous privilégiez, et qui revient à plusieurs reprises dans votre roman, c’est la bourgeoisie progressiste. Pourquoi êtes-vous si fumasse ?

JNO : Fumasse comme Pasolini après les affrontements du 1er mars 1968 à Rome, entre les flics et les étudiants, et qui rédige le poème Il PCI ai giovani, Le PCI aux jeunes. Ce texte est aujourd’hui encore très critiqué par les bourgeois gauchistes, car il ferait le jeu de l’adversaire. Ces gens-là ne comprendront jamais ce qu’ils appellent les « classes populaires », du haut de leurs universités, leurs séminaires, leurs diplômes, leurs associations. Ils ne comprennent jamais avec leur corps, ils en sont incapables. Ils ont besoin de la distance d’une théorie, d’un confort intellectuel à l’image du confort matériel de leur environnement d’origine, et cette théorisation est froide, violente, vide de la souffrance et de la joie d’un corps à travers la société qui le domestique, le tourmente, l’élève, le rabaisse, le laisse libre ou l’enferme, et cela depuis des générations. Et de fait, ils s’en foutent, ils ricanent de tout ou bien ils sont sévères, ils jugent en permanence. Ce sont des petits juges. Cette faculté de se croire des gens bien en jugeant X ou Y au restaurant et dans les dîners en ville, ou les réunions associatives est assez abjecte franchement. Ils se comportent en dilettantes, ils pourrissent les manifestations car c’est un divertissement pour eux. C’est une manière de faire chier papa, comme dit Pasolini. Ils rentrent après tranquillement chez leurs parents, et si l’on visite leurs squats, et qu’on apprend leur véritable origine sociale, on découvre que ce sont pour la plupart des héritiers qui auront un jour un patrimoine, donc pas besoin de bosser pour le construire. Le nombre de faux pauvres chez ces riches, c’est très drôle. La ZAD de Notre-Dame-des-Landes n’est pas Auroville, hélas. Et pourtant, il y a là-bas quelques belles volontés, mais réduites au silence par les gosses de bourges qui ont troqué leurs caprices pour des revendications « politiques », et avec la violence de gamins gâtés. Ce texte de Pasolini est essentiel, il est très contemporain, il pourrait être la première pierre d’une nouvelle vision économique et sociale. Ce sont eux, les progressistes, qui sont les vrais bourgeois, plus que ceux de droite. Ils pensent à gauche et vivent à la droite de l’économie, voire à l’extrême droite de celle-ci. Ce sont eux qui favorisent le totalitarisme. Ils en sont l’antichambre. Encore une fois, l’individu n’est pas réductible à une classe pour moi, sauf quand il réduit les autres à ces classes et se réduit lui-même à une identité contre les autres. Là, c’est de la petite bourgeoisie. Et oui, comme vous dîtes, ça me rend instinctivement fumasse.

VJ : Vous êtes très fumasse…

JNO : Non, ce sont des réflexions. Franchement, quand ce discours décolonial, néo-féministe ou que sais-je est produit par des blancs et des blanches souvent issus de classes privilégiées, produit par des blancs et des blanches ayant des postes à l’université, ou des postes dans des médias ou des entreprises, ou un héritage en capital quelconque, même symbolique, un nom célèbre, là, ça devient problématique. Surtout quand ils accusent plus ou moins ouvertement les blancs moins riches qu’eux d’être racistes, homophobes, etc. Prétendre que tous les blancs sont racistes quelle que soit leur origine sociale est une manière insidieuse pour les blancs mieux assis dans la société, avec carrière, salaire, accès faciles à la prise de parole, de perpétuer un racisme social séculaire. C’est valable pour les non-blancs universitaires, les non-blancs des classes aisées. C’est facile d’effacer sa richesse derrière sa sexualité, sa couleur de peau, etc. Blancs, noirs, hommes, femmes, hétéros, homos, mais d’abord des bourgeois dans leur façon de penser, d’agir, et ces gens-là ne doutent jamais de leur légitimité, de leur autorité. Ils ne sont jamais en colère de manière pulsionnelle, ils sont ironiques, arrogants, plein de condescendance, plein de sévérité aussi. Donc oui, ça me rend fumasse, mais pas longtemps. J’aime plus que je hais. Ma haine s’estompe devant l’amour et j’aime les bourgeois qui se comportent en aristos décadents, ou en populeux déconnants avec bière et saucisses, j’aime les riches et leurs turpitudes, et j’aime qu’ils redistribuent leur richesse dans des fêtes et du mécénat pratiqué à grande échelle. J’aime les sociétés qui laissent la nuit tranquille et libre, avec ses turpitudes et ses fêtes, et qui laissent les œuvres tranquilles, Marquis de Sade, etc. J’aime la ceinture tropicale de la Terre, l’Asie du Sud-Est et ses femmes natives ou transsexuelles. J’aime les prostituées, les danseuses, les universitaires le jour, danseuses la nuit, parce qu’elles ont besoin de fric, et que la modernité, ça coûte cher, il faut du fric pour être une contemporaine. Moi, je suis prêt à écrire des papiers mal payés pour financer mon voyeurisme de ces nuits. Mais on devrait me payer plus, j’écris sans filet. Le reste m’ennuie totalement, mais comme l’esprit du temps est à la « politisation », et à « l’embourgeoisie », à l’acte d’embourgeoiser les textes par des phrases courtes qui s’indignent de tout dans des réquisitoires où l’auteur est pur, et les autres des coupables impurs, et comme je n’habite pas une tour d’ivoire mais de béton, je me positionne un peu quand même.

VJ : Votre personnage principal se présente d’ailleurs ouvertement monarchiste, nostalgique de l’Ancien régime. C’est aussi votre cas ?

JNO : Disons que comme mon Gauguin, j’apprécie les sociétés en fonction des arts qu’elles produisent. Rien n’égale pour l’instant les arts des régimes royaux et sacerdotaux. On sait aujourd’hui que temples et palais, pyramides et autres Louvre n’étaient pas bâtis par des esclaves mais des ouvriers spécialisés bien payés. Mieux que les sous-prolétaires actuels sur les chantiers modernes. Aristocratie et prêtrise fonctionnaient ensemble, avec les castes agraires et marchandes. Les anciens régimes pratiquaient aussi la séparation des pouvoirs, les démocraties n’ont rien inventé de ce point de vue. Pouvoir royal, sacerdotal, agraire et marchand devaient fonctionner ensemble, et les problèmes surgissaient lorsqu’un déséquilibre apparaissait – monarchie absolue, théocratie. On regarde les gens du passé comme des barbares, des sauvages. Pas mieux que les colonisateurs. On veut civiliser le passé, réformer leur vocabulaire, leurs mœurs… Mais la monarchie est impossible aujourd’hui. Donc, je ne suis pas nostalgique, je ne suis pas monarchiste dans ce sens-là. C’est prétendre faire renaître les morts. Ce qui est mort est pour l’instant mort, et si ça doit renaître, ça renaîtra de circonstances encore inimaginables. Et je ne suis pas du tout malheureux d’être né dans la pourpre de la Ve République du Général de Gaulle. J’adore de Gaulle. J’adore mon passeport et les possibilités qu’il me procure. Je comprends qu’on souhaite venir en Europe pour bénéficier d’un tel passeport.

VJ : Vous seriez né au XIXe siècle, vous seriez qualifié de contre-révolutionnaire. Vous seriez amis avec Joseph de Maistre, Barbey, Bonald ?

JNO : Joseph de Maistre avait l’air d’un honnête homme et le fréquenter aurait certainement été un plaisir. Je crois qu’il aurait accepté de me fréquenter aussi. Dériver avec lui sur une chaloupe le long de la Neva, quel honneur pour moi. Le lire est dans tous les cas un absolu plaisir. J’aime bien Barbey aussi, mais moins que de Maistre. Bonald m’indiffère, sa langue est lourdingue et triste. De Maistre, c’est tragique et somptueux, monarchiste et catholique de façon grandiose. Ça ne pleurniche jamais. C’est mort ou vif. Arnold Schoenberg, encore une fois, est un modèle pour moi.

VJ : Sur le Paris d’aujourd’hui, vous n’avez pas de mots assez durs contre la ville, et vous écrivez p.388 : « On ne vivait presque plus rien, mais on réfléchissait sans fin à tout ». C’est bien vu…

JNO : Oui, Paris et le néant. Du moins le Paris intellectuel, universitaire, médiatique… Ce que je trouve stupéfiant, c’est que beaucoup de gens y parlent comme s’ils avaient tout connu, tout vécu, alors que non, rien du tout, ils ont une vie théorique, ils sont blasés avant d’avoir vécu quoi que ce soit. Leurs blessures, ils les politisent, c’est-à-dire qu’ils tuent la vie en eux. Ils en font aussi des arguments d’autorité pour tuer tout débat, ce qui fait que je doute parfois qu’ils aient souffert, car la souffrance ne se résout que dans la vengeance, l’oubli, la sublimation, certainement pas dans les longs discours mélis-mélos. L’ignorance et la certitude les animent plus que la curiosité, la bienveillance, la soif d’apprendre et d’expérimenter. C’est paradoxal. Nous sommes plus libres qu’ailleurs, mais le savoir y devient clôture, mur, tour de contrôle. Vivre en couple mixte, comme on dit, m’offre une morale immédiate, celle du décentrement, celle du doute et du questionnement, et je sais que nous vivons plus librement qu’ailleurs, et que nous sommes fatigués de cette liberté, nous cherchons des chaînes et nous allons les trouver à force… À l’opposé de ce néant de Paris et de l’Occident moderne blasé, je défends et cultive une certaine naïveté, une certaine innocence, un enthousiasme, et le droit d’être lyrique et subjugué. J’écris en levant la tête, pas en la baissant pour plaindre mon sujet ou l’expliquer ou faire le snob, ni accuser qui que ce soit, sauf quand celui ou celle accusant et s’indignant à tout va, désigne des coupables dans des tribunes par exemple, sans même connaître ce dont il ou elle s’indigne. « Ne jugez pas et vous ne serez pas jugés à votre tour ». On devrait placarder cette parole du Christ aux entrées des universités, des grandes écoles, des institutions X ou Y, au lieu de « Polanski pédophile », comme j’ai vu un jour aux murs d’une fac de Lille. Le Christ, rien que le Christ et les Saintes femmes, les mères, les filles, les sœurs, les cousines, les mendiantes, les femmes publiques.

VJ : Vous écrivez : « en amour, il n’y a presque que des faux ». En Thaïlande, avec les putes, il semblerait que l’amour soit vrai…Vous pouvez nous expliquer cela ?

JNO : Vous l’expliquer non. C’est inexplicable et le roman commence là, dans cette part irréductible, inexplicable de l’expérience. Quand on se maquille tout le temps, la peau nue, la nudité d’un visage, n’est qu’un maquillage de plus. On est nu comme on se vêt. On s’ennude comme je l’écris dans le roman. On vend l’authenticité de sa peau sans blush alors qu’on ment d’autant plus. Donc, la vérité, celle de l’amour par exemple, est celle du moment dans les nuits tarifées d’Asie. Parfois, ça dure, on intègre la famille de la fille, elle prend soin de nous comme elle prend soin des siens quand soi-même, on ne peut plus prendre soin d’elle et des siens financièrement. Ça peut arriver. La fiction est plus vivante que la vérité à mon sens, et les filles de la nuit vous transmettent ce vieux savoir. Vivre, c’est mentir et se mentir, il faut construire des récits palliatifs au sablier qui débute avec la naissance. La fiction et le réel ne s’opposent plus. Le réel est fictif dans le monde des nuits d’Asie du Sud-Est. C’est pour ça que j’écris des phrases fardées. La phrase fardée, c’est l’un des credo de mon art poétique, si j’en ai un. Mes phrases sont fardées d’adjectifs, de tournures étranges et colorées, comme les filles de la nuit thaïlandaise se maquillent et se déguisent de leurs talons et de leurs soins.

VJ : Vous revalorisez, obsessionnellement, dans ce livre, la figure de la prostituée, de la prostituée thaïe. En quoi selon vous, est-elle revalorisable, alors qu’aujourd’hui, en Occident, on crie au scandale ?

JNO : Disons que j’aime leurs valeurs d’aristocrates de rue, ça c’est certain. Elles ruinent des hommes et parfois des femmes qui les aiment, elles se ruinent elles-mêmes, elles vivent. Elles sont souvent mères et filles, et j’aime qu’elles soient cheffes de leur famille restée au loin. Le matriarcat est très fort en Asie du Sud-Est, et je n’entrerai pas dans les subtilités sur ce qu’est ou non le matriarcat. Tout ce que je vois, tout ce que je sens, ce sont des femmes, le plus souvent seules, qui travaillent très dur, éduquent et nourrissent leur progénitures et leurs parents, dirigent à distance la survie des leurs, financent études et soins de santé, font construire une maison, achètent des terres, font la fête, flambent, tombent amoureuses, préfèrent souffrir d’amour que de ne plus rien ressentir du tout, embellissent les villes, embellissent les nuits des villes, vivent selon les règles qu’elles se donnent, ont soif du monde, soif de réussite, soif de paysages, soif d’annexer la nuit à leurs pas, dépassent leurs peurs, font peur, se tatouent, prient aux temples, font des offrandes aux moines le matin, sont particulièrement amènes et respectueuses avec les amputés, les aveugles, toute une clientèle qu’on appelle handicapée, s’alcoolisent, se droguent, chopent des maladies, et certaines gagnent et d’autres perdent. Entre autres actions. Il est vrai qu’elles m’inspirent plus que n’importe quelle autre femme. Autour de moi, il n’y a que des femmes sans pères, ou des femmes sans pères qui ont éduqué seules leurs enfants, car les géniteurs se sont tirés, et elles m’inspirent infiniment. Alors les palabres interminables sur le patriarcat, je m’en fiche complètement. Ces femmes-là s’en fichent complètement. Et si la prostitution, la condition de prostituée scandalise les gens, j’ai une méthode très simple pour ces hypocrites : vous demandez à une prostituée combien elle gagne par mois, vous lui donnez cette somme et vous l’augmentez de 20 %, à condition qu’elle signe un papier officiel où elle s’engage à ne plus se prostituer. Certaines iront quand même pour faire plus de fric. L’argent est l’horizon indépassable de toute discussion sur un tel sujet, et j’ai envie de dire, sur la société en général. Qui gagne quoi, qui paie qui, qui manque de quoi, qui a besoin tout de suite de quoi et de combien ? Quand j’entends dire que l’argent n’est pas l’essentiel et qu’on peut décroître… Oui, en Occident, c’est sûr qu’on va décroître et qu’il va falloir se battre à nouveau pour survivre, comme nos grands-parents. Mais allez dire à des gens sortant de la misère qu’il faut décroître pour sauver la planète, c’est comme expliquer à un mendiant qu’il faut faire des économies. Le cynisme des gens favorisés qui réfléchissent sur la misère au lieu de donner leur pognon m’exaspère, et puis je me calme en compagnie des filles de la nuit thaïe et leurs riches sponsors qui font offrande de leur argent.

VJ : Bangkok, écrivez-vous p.156, est un « espace de désirs indéfiniment renouvelés ». Le désir, voilà la question…

JNO : Bangkok est l’héroïne de ce livre, avec ses habitantes. Les ruelles, les soïs de Bangkok. Ses cinquante districts comme il y a cinquante États aux États-Unis. Se laisser mener par ses désirs, c’est vieux comme l’écriture sans doute, vieux comme les glyphes d’amoureux à Rome, ou Canope, une cité bordel de l’Égypte antique. Mes romans sont d’immenses graffitis se faisant l’écho, le miroir, la copie des désirs nés de Bangkok et de ses habitantes. J’aimerais qu’après la lecture de Femmes sur fond blanc, on se fende d’un billet en solitaire pour Bangkok.

VJ : Plus généralement, le livre est un hymne, une déclaration d’amour à la Thaïlande. À quoi ressemble cet amour ?

JNO : Eh bien précisément à mes textes ! Mes textes sont des déclarations d’amour à cette région du monde et ces déclarations prennent la forme de livres. Ce sont des livres obsessionnels et fétichistes, car cet amour est obsessionnel et fétichiste, et il y en aura d’autres, toujours, jusqu’à ma mort, pour mettre en scène les femmes de la nuit en Asie du Sud-Est, avec les bars, les clubs, les cabarets, les plages, les tarifs, la seule poésie tolérable car elle est précise.

VJ : Avez-vous déjà des réactions à votre roman, qui vient de paraître ?

JNO : Des articles formidables d’Olivier Mony, qui se révèle un frère. C’est déjà merveilleux. Et puis la vôtre, ça aussi c’est merveilleux. Les libraires, je n’en sais rien pour l’instant, les autres critiques non plus. Il y a la peur d’une polémique. Je ne vois pas pourquoi. La bourgeoisie progressiste qui déclenche des polémiques le fait non pour les victimes, dont elle se fout, mais pour prendre le pouvoir. Ai-je un quelconque pouvoir social ? Il faut acheter ce livre, le lire, le commenter. J’ai – aveu sans chichis, difficile mais sans chiffon célinien, sans pelisse lourde aux épaules glacées par un Danemark, un damné d’âne du Deutsche mark, mais aveu quand même et sincère, chauffé aux Tropiques du cœur et du sexe – besoin d’argent, là, tout de suite, pour les miens, et pour des séjours lointains, et pour vous effrayer, vous amuser un peu encore, et puis plaire aux morts que je lis. Voilà.


Jean-Noël Orengo, Femmes sur fond blanc, Grasset, 416p., 24 €

 

[Photo : JP Paga/Grasset – source : http://www.laregledujeu.org]

Activistes i lingüistes repassen la importància dels avenços a internet per al català, l’occità, l’amazic i l’aragonès

Escrit per DAVID FORNIÈS

L’occità s’està dotant d’un bon nombre d’eines tecnològiques per a garantir el futur digital de la llengua. El projecte Araina —que en la seva primera marató de veus, aquest 17 de desembre a Vielha, ha recollit la parla d’un centenar de persones— i els recursos que ofereix Lo Congrès en són mostres destacades. Igual que per a l’occità, la presència digital és un objectiu estratègic per a totes les llengües minoritzades: una idea que han compartit els lingüistes i els activistes participants en el seminari “Sobirania digital-tecnològica, pobles i llengües minoritzades” que el Departament de Filologia Catalana i Comunicació de la Universitat de Lleida, el CIEMEN i la Fundació pels Drets Col·lectius dels pobles han organitzat els dies 13 i 16 de desembre a la capital del Segrià, amb coordinació dels lingüistes Jordi Suïls i Helena Torres Purroy.

Ser conscients del desequilibri per a capgirar la situació

“Avui, el 95% de les llengües no tenen la capacitat de pujar digitalment”, cosa que significa que no poden mantenir la seva versió de Viquipèdia, no tenen classes de llengua i no estan creant dades de tecnologia lingüística. Ho ha dit Alp Öktem, lingüista computacional de Col·lectivaT, cooperativa especialitzada en el desenvolupament d’eines lingüístiques digitals. Aquest, ha valorat el lingüista, és un aspecte a considerar en els processos d’extinció de les llengües. Segons la UNESCO, al final del segle XXI el 90% de les llengües del món podrien quedar substituïdes per un grapat d’idiomes dominants.

Öktem ha destacat que el desequilibri també es dona entre les llengües més parlades, i fa anys encara era més acusat. L’anglès, llengua en què es troba gairebé el 59% del contingut del web mundial, només és parlat pel 18% de la població del planeta. Un salt enorme respecte de la segona llengua al web, el rus, que es queda al 5,3%. Només l’espanyol, el francès, l’alemany i el japonès superen el 3%.

Per a les llengües menys difoses, la presència digital és fonamental, ha dit Öktem: “Quan la gent veu que el seu idioma està en línia, canvia la seva perspectiva. La gent s’adona que pot continuar usant-lo. I el fet que hi hagi persones que hi creen continguts pot servir de base per a desenvolupar noves tecnologies lingüístiques”, entre les quals, ha explicat el lingüista, eines de traducció automàtica, reconeixement automàtic de la parla, generació de textos, síntesi de text a veu… amb usos com la traducció assistida, la subtitulació automàtica, l’escriptura assistida, el doblatge automàtic o l’aprenentatge assistit d’idiomes.

Per a fer-ho possible, “tot passa per la disponibilitat de dades. Per a fer traductors automàtics, per exemple, necessitem milers i milers —de fet, milions— de frases traduïdes en paral·lel. Perquè la intel·ligència artificial decideixi traduir d’una forma o d’una altra, entren en joc el càlcul de probabilitats, el context del text… Això ara està molt avançat i amb les xarxes neuronals encara més, però per a aquestes ens cal introduir encara més dades”.

L’occità: maratons i ‘youtubers’

Un exemple d’avenços recents com els que esmenta Öktem és l’occità. La novetat més recent és el llançament del projecte Araina o, cosa equivalent, la construcció d’un corpus de veus en occità aranès a través de la plataforma Common Voice. La primera gran fita ha estat la marató de veus de Vielha aquest 17 de desembre, en què un centenar de persones han donat les seves veus per a enregistrar vora 4.000 frases, amb una durada total de vuit hores de gravacions. Col·lectivaT explica que cal enregistrar 100 hores per a poder desenvolupar els primers prototips de sistemes de la parla en aranès.

L’activista per la revitalització lingüística de llengües minoritzades Mariona Miret ha repassat altres recursos que es despleguen avui a Occitània. Entre els més destacats hi ha els de Lo Congrès, com ara el traductor automàtic Revirada —construït sobre la base del sistema de codi obert Apertium, desenvolupat a la Universitat d’Alacant— o Votz, de síntesi de veu. A Lo Congrès també es poden trobar el diccionari Dicod’Òc, un corrector ortogràfic, una base terminològica i aplicacions per a telèfons mòbils, entre altres eines. “Avui podem ser més optimistes que fa un any”, ha valorat Miret.

Gabrièu Pelisson, Mariona Miret i Helena Torres

Aquesta feina se suma a la que fa temps que diverses entitats occitanes duen a terme. Una de les associacions actives en aquest camp és Chambra d’Òc. Miret, que hi col·labora des de fa anys, n’ha destacat la feina en toponímia i, actualment, el desenvolupament d’un diccionari en línia de l’occità alpí que recull materials actualment existents en paper. “Tots els operadors de la Chambra hi estan bolcats ara mateix”, ha explicat Miret, que també ha avançat que l’entitat té previst fer una tasca similar per a posar en línia un diccionari de francoprovençal. Per Miret, “és important saber quines són les necessitats dels parlants, per a no fer productes tecnològics perquè sí. Afinar què fas, perquè tingui utilitat”.

Una altra contribució digital, en aquest cas més enfocada a la documentació, és la proposta de Niccolò Fantini i Guglielmo Diamante a De Vulgare, un web que recull i difon talls de veu en multitud de llengües minoritzades —entre les quals l’occità— i varietats locals d’Itàlia. “Ho fem amb l’esperança que la preservació d’aquest patrimoni promogui una major conscienciació” respecte del valor de la diversitat lingüística, ha explicat Fantini. De Vulgare usa el seu compte d’Instagram per a crear stories atractius a partir d’aquests talls.

Justament, un camp de batalla essencial és el de l’atractiu de l’idioma: “El màrqueting és extremadament important per a les nostres llengües”, ha dit l’activista. I s’ha referit a casos d’èxit com el del youtuber niçard Gabrièu Pelisson, que manté el canal Parpalhon Blau amb més de 6.000 subscriptors. Pelisson ha intervingut al seminari en vídeo: “El meu canal”, ha explicat, “ha demostrat que hi havia una certa quantitat de gent que tenia l’expectativa de veure continguts en occità”. “I a mi”, ha conclòs el youtuber, “m’ha servit per a no haver-me de fer segons quines preguntes: ho faig en occità perquè és la meva llengua”.

L’aragonès treu el cap a la ‘tele’

També amb un canal de YouTube —sobre cuina vegana en aragonès— va començar a fer-se coneguda Silvia Cebolla, activista d’aquesta llengua pirinenca. “Quan vaig llançar el canal, molta gent em deia: ‘I per què no el fas en castellà?’. ‘Doncs perquè l’objectiu és l’aragonès!’, els contestava”.

El 2019, Cebolla va passar a presentar el programa Charrín Charrán, a la televisió pública Aragón TV. “Gràcies a aquest programa —i al fet que estigui disponible a internet— molta gent a Aragó s’ha adonat que l’aragonès existeix i que podem parlar de qualsevol cosa en aquesta llengua”, ha dit Cebolla al seminari. “Si la llengua surt a la tele, existeix, li dona prestigi i més persones s’hi interessen”.

Helena Torres i Silvia Cebolla

L’aragonès encara avui ha de fer front a prejudicis dins mateix d’Aragó, fruit d’un procés secular d’aculturació i opressió lingüística. En aquest context es donen situacions ambivalents, explica l’activista: “Molta gent no està disposada a anar a una escola a aprendre aragonès. Per contra, l’aragonès transporta aquesta mateixa gent a un enyor del poble, de la família, de la tieta… perquè en el castellà popular d’Aragó s’han preservat moltes paraules de l’aragonès”. Cebolla pensa que la gent més jove ara veu l’aragonès com un tret “més normal” del país: “Potser no tenen interès a aprendre’l, però manifesten actituds més receptives; la gent més gran ho tendeix a veure d’una forma més negativa, perquè ho perceben com una cosa polititzada”.

Impuls digital per a l’amazic des de Catalunya

Com a contribució a la sobirania digital i tecnològica de l’amazic, la Casa Amaziga de Catalunya (CAC), Col·lectivaT, el CIEMEN i la Fundació pels Drets dels Pobles desenvolupen des dels primers mesos de 2022 un traductor automàtic d’aquesta llengua nord-africana. Més endavant, aquesta feina —que s’insereix dins del projecte Som Part— veurà també el desenvolupament d’eines de text a veu i completarà altres recursos ja existents fruit de la col·laboració de la CAC i el CIEMEN, com les unitats didàctiques Tc wawjdm per a l’aprenentatge de l’amazic.

L’amazic és parlat per 25 milions de persones pel cap baix, sobretot al nord d’Àfrica i també a la diàspora —a Catalunya es compten per desenes de milers—, però això no l’allunya del perill de la substitució lingüística. Ho ha recordat Aziz Baha, de la CAC, que ha recordat que diverses varietats de la llengua ja s’han extingit. La resta pateixen la pressió de l’àrab i el francès: “Quan els francesos van ocupar el Marroc, van trobar que el 90% de la població parlava amazic. Avui estem al voltant del 30%”, ha explicat Baha. “I tot i que la llengua ha tingut recentment un reconeixement oficial i s’estandarditza, el procés de substitució no s’ha aturat pas”.

En l’àmbit digital, l’amazic disposa d’eines fonamentals com fonts compatibles amb unicode (l’amazic disposa de l’alfabet tifinag que ara guanya terreny, però també té l’alfabet llatí que s’ha usat des de fa dècades a Algèria, amb caràcters específics), un teclat propi, diccionaris en línia (els dos més destacats, ha dit Baha, són Amazic.cat i el de l’Ircam), aplicacions d’aprenentatge i cursos i, cada cop més, presència en diferents xarxes. Un dels exemples més reeixits és el que impulsa l’activista lingüística catalanoamaziga Ghizlan Baryala al compte Amazigh Talks d’Instagram, amb més de 20.000 seguidors.

Softcatalà, un exemple consolidat en llengua catalana

L’associació Softcatalà treballa des de 1998 per a “crear eines pròpies, promoure un ús real de la llengua i fer-ho des del treball col·laboratiu”. Ho ha explicat Belén Ivars, una de les persones que formen part del grup nodrit de treballadors que fan possibles aquestes eines i la seva difusió.

“Els primers anys”, ha explicat Ivars, “Softcatalà es dedicava a traduir programari i recursos: no hi havia pràcticament res fet. Una de les traduccions a què tenim més estima és la del LibreOffice, un programa que empra molta gent. Aquest és el nostre èxit: hem elaborat coses que gasta la gent corrent”.

Altres projectes menys visibles, com l’Abril o l’Ela Geminada, són fonamentals. “Que les coses estiguin correctament escrites és summament important per a les persones que tenen diversitats auditives o visuals. I també per a les persones que troben un text i el volen traduir: si no està ben escrit, no es podrà traduir bé”.

Softcatalà també té cura d’oferir la majoria de les seves eines tenint en compte la diversitat interna de la llengua, de la qual molts parlants —especialment els del català central— no en són prou conscients: “A mi m’han arribat a acusar d’escriure en catanyol pel fet d’haver usat accentuacions diferents que tenim en valencià i que són igualment correctes. Em va sorprendre que un poble amb tanta consciència de la llengua com el català al mateix temps desconeguera tant el que passava en els altres territoris on es parla l’idioma”, ha relatat Ivars.

En l’etapa més recent de Softcatalà es desenvolupen eines com el corrector, el comptador de síl·labes, el conjugador de verbs i els traductors, incloent-hi el neuronal. “La més utilitzada és el corrector. I les eines les usen no només catalanoparlants, sinó que una bona part d’usuaris o no parlen català, o no el parlen gaire bé i les usen per a aprendre’n”.

Finalment, Softcatalà és des de 2018 l’entitat col·laboradora per al català de Common Voice, un projecte de la Fundació Mozilla que persegueix l’objectiu que la tecnologia que funciona amb ordres de veu reconegui totes les llengües del món. En el cas de Common Voice en català, els catalanoparlants poden donar talls de veu que queden enregistrats en una base de dades que els emparella amb els corresponents textos escrits. Aquesta base de dades, que és lliure, es pot emprar per a entrenar intel·ligències artificials per al reconeixement de la parla o la síntesi de veu.

 

[Fotos de l’autor – font: http://www.nationalia.cat]

Escrito por Juan Oliver

A Coruña.- Gracilinda e Ernestina son irmás pero viven a 3.400 quilómetros de distancia. Os que separan a illa de Santiago, en Cabo Verde, da localidade de Burela, na costa de Lugo. Gracilinda, a maior, nunca emigrou porque non quería deixar aos seus fillos. Ernestina si marchou, pero asegura que en canto teña vinte anos cotizados á Seguridade Social en España, volverá cos seus.

Gracilinda e Ernestina en realidade non se chaman así, pero os seus nomes non son inventados. Son os seus nominhos, un costume típico de Cabo Verde: dá igual o que poña na túa partida de nacemento ou na túa cédula de identidade, o teu nominho é o único apelativo polo que che coñecen a túa familia, os teus amigos, os teus veciños.

Gracilinda e Ernestina, xunto a outra ducia de mulleres, son as protagonistas do documental Si ka badu, ka ta biradu –Se non marchas non podes volver, en creoulo caboverdiano-, dirixida por Sonia Díaz e Óscar Vázquez e que a Asociación Galega de Comunicación para o Cambio Social (Agareso-Reporteiros Galegos Solidarios) acaba de estrear.

Un fotograma de «Si ka badu, ka ta biradu»

A través dos relatos dunha ducia de mulleres de catro xeracións, a cinta narra como teceron durante décadas a rede de apoio mutuo e solidariedade para garantir a supervivencia das súas familias, tanto das que marcharon como das que quedaron. Unha historia de heroínas anónimas, de empoderamento feminino e, tamén, de discriminación e inxustiza: a que sofren as mulleres pobres de dúas sociedades, en Cabo Verde e en Galicia, que lles entregan en exclusiva a elas o rol de coidar dos demais.

«A comunidade caboverdiana en Burela ten unha particularidade moi específica, e é que as mulleres quedaban soas boa parte do tempo», explica a antropóloga Luzia Oca. É autora do libro Caboverdianas en Burela (1978-2008). Migración, relacións de xénero e intervención social, e forma parte, xunto a Antía Pérez CaramésBelén Fernández SuárezKeina Espiñeira González e Iria Vázquez, do Equipo de Investigación Sociedades en Movemento (ESOMI) da Universidade da Coruña, en cuxa investigación académica, na que tamén participaron as universidades de Vigo e de Trás-Móntes e Alto Douro, na rexión Norte de Portugal, se basea o documental.

Burela é unha pequena localidade costeira de 9.000 habitantes na comarca da Mariña Central lucense, cun dos portos pesqueiros máis importantes do Cantábrico. O emprego vinculado á súa frota de altura atraeu durante anos a emigrantes do resto do Estado e doutros países, ata o punto de que o 16% dos veciños da localidade son estranxeiros. Curiosamente, da trintena de nacionalidades empadroadas en Burela, a comunidade máis numerosa, case a metade, é a que provén da máis pequena de todas elas.

Fotograma del documental

A República de Cabo Verde son dez illas volcánicas situadas fronte a Senegal a uns 1.500 quilómetros ao suroeste de Canarias. O arquipélago foi colonizado polo Imperio Portugués e poboado con escravos negros, cuxos descendentes se independizaron de Lisboa en 1975. É un país pobre, cunha renda media por persoa por baixo da de Iraq, Bolivia ou Usbequistán. Tamén está entre os de maior incidencia migratoria do mundo, porque ten apenas medio millón de habitantes dos que máis de 186.000, segundo a ONU, marcharon. Se se suman os descendentes de quen o abandonaron no últimos cincuenta anos, algunhas fontes falan dunha diáspora que multiplicaría por tres á poboación que vive nas illas.

Os primeiros caboverdianos que chegaron a Burela eran homes que emigraron a finais da década dos setenta, atraídos polas oportunidades laborais que ofrecía a fábrica de aluminio próxima que acababa de abrir, e que deixara sen man de obra á frota pesqueira. Con fama de mariñeiros formados e de bos traballadores, os patróns galegos deseguido animaron a aqueles pescadores africanos para que trouxesen aos seus parentes ao pobo.

Durante anos Burela foise enchendo de caboverdianos homes que deixaron ás súas nais, mulleres e fillas a cargo das súas familias na illa de Santiago, e que puideron atopar a saída profesional e vital que o seu país lles negaba. Con todo, coas mulleres non sucedeu o mesmo. Cando algúns homes puideron reagrupar ás súas familias en Galicia, o que atoparon elas foi o mesmo: a obrigación de asumir o seu coidado, posto que os homes se pasaban meses seguidos pescando no mar. Ademais, a maioría estaban en situación irregular. Ao contrario que eles, elas chegaban sen contrato, e se buscaban un traballo o único que atopaban era de novo na limpeza ou na atención a nenos, persoas maiores, dependentes… Ou ambas as cousas.

«É unha extensión transnacional dos coidados», subliña Antía Pérez Caramés, profesora de Socioloxía da Universidade da Coruña, que explica que as mulleres se converteron no eixo da estrutura da comunidade emigrada que permitiu ás súas familias asentarse e prosperar, e garantir á vez a supervivencia de quen quedaron. «Cando nós emigramos, facémolo obrigadas a xestionar quen vai coidar da nosa familia no noso país de orixe, e á vez coidar nós aos demais no país de destino», engade.

O documental relata como as caboverdianas das primeiras xeracións de emigradas a Burela coidaban a nenos alleos e parentes maiores doutras mulleres, mentres os seus quedaban ao cargo das súas irmás, nais ou fillas na illa de Santiago. E como as súas netas e bisnietas, nadas e criadas en Galicia e que compaxinan a súa vida laboral co coidado das súas familias, se declaran agora dispostas a deixar os seus estudos ou os seus empregos en Burela se tivesen que coidar das súas nais, avoas e bisavoas.

A cinta conta como as mulleres envían a Cabo Verde boa parte dos poucos aforros que poden xuntar porque saben que son imprescindibles para a subsistencia dos seus -as remesas dos emigrantes, segundo asegura o documental, representan o 10% do PIB de Cabo Verde-. Tamén narra como puxeron en marcha entre Galicia e as illas unha trasfega constante de «encomendas»: maletas, caixas de cartón e bidóns de plástico con roupa, enxoval, medicinas, bens de aseo e utensilios de cociña que viaxan de Burela a Santiago, e modestos pero reparadores agasallos e recordos que se envían de volta desde a illa cara á costa galega.

Cartaz do documental

«Cando recibes unha “encomenda” matas a morriña un pouco. Ese intercambio é unha forma de abrazarnos», di Bentinha, unha das mulleres. Bentinha, Gracilinda, Ernestina, FunhaZuleikaQuintaDezidéria, IsaMelanieBelitaSizaTeresaJoiaBilitaNila… Son os nominhos desas heroínas cuxas vidas, deseñadas pola emigración e pola discriminación, se recollen no documental.

A codirectora de Si ka badu, ka ta biradu, Sonia Díaz, asegura que a filosofía de Agareso, unha ONG para o desenvolvemento, é «contar historias que ninguén conta e que as conten os seus protagonistas». Ou sexa elas. E nega que a historia heroica desas mulleres sexa exclusiva da emigración caboverdiana: «Non estamos afeitos ver a emigración cunha mirada feminina, por iso é polo que a historia pode parecer excepcional. En realidade, o excepcional é a mirada coa que se conta esa historia».

Si ka badu, ka ta biradu estreouse o pasado 3 de decembro no festival Cinema Rabudo da Coruña, e este domingo, Día Internacional da Poboación Migrante, proxectarase ás 18h na Casa dá Cultura de Burela. Despois, a organización poñerá a cinta a disposición «de calquera persoa ou colectivo que queira proxectala en actividades sobre a relevancia dos coidados para o benestar social e a contribución das mulleres migrantes ao desenvolvemento dos seus países de orixe e destino».

 

[Fonte: http://www.luzes.gal]

Escrito por Claudio Ferrufino-Coqueugniot

Diría « la bella lengua », pero ello puede dar lugar a interpretaciones equívocas y no quiero correr el riesgo de los políticos cuando sueltan, eso sí, la lengua y no el idioma en sus soporíferas y malhadadas reuniones.

Elisabeth Malkin, escribiendo para el New York Times (Rebelling Against Spain, This Time With Words), anota con certeza que sería muy difícil que los Estados Unidos aceptaran imposiciones de Inglaterra en el uso del inglés. ¿Por qué tendríamos nosotros que hacerlo, siendo que supuestamente nos desembarazamos de España hace 200 años? Además, si existe una irrefrenable dinámica en el español la damos los latinoamericanos, en la diáspora económica de la emigración, fenómeno que no únicamente se refiere a la península versus las excolonias sino también a distancias mucho menores como la existente entre México y Los Ángeles, entre los « manos » de abajo del río Bravo y los « carnales » o « batos » de arriba del Grande, entre los mexicanos huidos del temporal de la revolución y sus hijos nacidos « al otro lado » y que terminan rechazando su origen, haciéndose híbridos, formando un nuevo grupo humano que no pertenece ni a sus ancestros ni a la sociedad extraña en la que nacen y crecen. Octavio Paz categorizó a estos « pachucos » como parias (no sólo del lenguaje).

En una vieja (quizá años 40) y linda canción, « El bracero y la pachuco », el Dueto Taxco ponía en escena esta llamemos confrontación entre lo antiguo (México) y lo nuevo (Estados Unidos), entre lo obsoleto y lo moderno, rivalidad que se expresaba sobre todo en el lenguaje. El bracero: romántico, formal, varonil, tradicional quiere conquistar a la pachuca: desenfadada, informal, liberal, irreverente, y su duelo verbal, divertido por cierto, apunta a las diferencias entre unos y otros, en un español alejado de las normas de la academia y sin embargo todavía español, plagado de anglicismos; jerga, caló cuyos orígenes tal vez se expandan hasta los judíos conversos, o escondidos, que llegaron con la conquista. El bracero le dice « Oh, mujer del alma mía, o ámame porque te quiero, o quiéreme porque te adoro, porque mi aliento perfumas, linda princesa encantada, como si trajeras rosas, de esas rosas encarnadas que con sus lindas aromas a mi pecho cautivaran (…) ». « La pachuca no entendía lo que le quiso decir » y le responde: « Nel esé, ya párele con sus palabras de l’alta, que por derecho me agüitan, esé. Mejor póngase muy al alba con un pistazo de aquella, y un frasquito del fuerte p’a después poder borlar ». Resulta que a pesar de una temprana incomprensión terminan casándose, ampliando el espectro de su idioma de admirable manera.

Ya lo entendió un visionario Valle-Inclán en su « Tirano Banderas », que es un viaje por un mapa fructífero, encantador y encantado del idioma, una exploración y un descubrimiento, la muestra palpable que lo mayor que dejó España fue la lengua, y lo mejor que ganó del opuesto fue su multiplicación en matices, tonos, formas, que siguen creciendo a medida que los otrora pueblos del sur van de a poco apoderándose de espacios vitales que « correspondían » a otros, tanto que entre los mexicanos se habla de « reconquista », siendo a su vez también revancha de España por todo lo perdido ante ingleses y norteamericanos.

Que existan normativas de lenguaje, sin duda sirve, tal vez al menos para mantener apariencias de orden en un caos no destructivo. El detalle nuevo de la Academia (que disgustó a Juan Villoro) de anular el acento de « sólo » (solamente) y diferenciarlo de « solo » (de soledad) por el contexto, es más bien un detalle estético; las transformaciones del español y la aceptación de ellas como parte real y concreta del idioma hablado -y después escrito- van más profundo, y merecen no únicamente estudio sino respeto. Para mí, por dar un ejemplo, me es más fácil hablar con mis colegas de los ranchos de Guerrero o los pequeños zapotecos de la frontera entre Oaxaca y Veracruz en su estilo y no en el mío de « l’alta ». Si quiero decir « ese tipo se cree divertido », me entenderán mejor si les digo que « ese gacho se cree chido ».

Pienso que Octavio Paz se equivocó. Aquellos pachucos que fueron parias en su laberinto de soledad, extendieron la jerga de sus tradiciones noveles y contradictorias no sólo a México, también a todo el sur. Café Tacuba canta:

Mejor yo me echo una chela

y chance enchufo una chava

chambeando de chafirete

me sobra chupe y pachanga

¿Y la Academia? Chinga su madre…

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[Publicado en Ideas (Página Siete/La Paz) – imagen: Lucas van Valckenborch/La Tour de Babel, Musée du Louvre, Paris, 1594 – reproducido en lecoqenfer.blogspot.com]

Benoît Fader Keita, de son nom d’artiste Beni Fadi, chante dans sa langue maternelle, le mënik, menacé d’extinction. En octobre, il sortait un mini-album Farkoko dans lequel se mélangent sonorités traditionnelles et musique électro.

Beni Fadi, 2022.

C’est depuis son champ, à Bandafassi, à plus de 700 kilomètres au sud-est de Dakar, que Benoit Fader Keita – de son nom d’artiste Beni Fadi – nous accorde une interview au téléphone. Très attaché à sa région située à quelques kilomètres de la Guinée Conakry, le musicien de 37 ans est retourné dans son village d’origine pour la récolte à la fin de la saison des pluies.

Le reste de l’année, le jeune homme est concentré sur son projet de musique électronique : composer et chanter pour sauver sa langue, le mënik, menacé d’extinction. Il a d’ailleurs sorti son premier EP de trois titres appelé Farkoko (qui veut dire « caméléon ») le 7 octobre dernier, produit en collaboration avec le collectif panafricain ElectrAfrique et le collectif berlinois Rise. « Je suis issu de l’ethnie Bédik qui est très mal connue, même au Sénégal », s’inquiète Beni Fadi. Seuls quelques milliers de personnes continuent de parler sa langue maternelle, considérée comme l’une des près de 2 500 langues en danger dans le monde selon l’UNESCO.

Selon la tradition orale, le peuple Bédik – très animiste – a quitté le Mali pour fuir l’islam et conserver sa culture. Ils se sont alors réfugiés au XIIe siècle dans les grottes et les rochers des montagnes de Bandafassi, où se trouvent encore aujourd’hui quelques villages où se déroulent les cérémonies traditionnelles « avec des sacrifices, des chants, des danses, de la bière de mil et du vin de palme », raconte Benoît Fader Keita.

Après avoir eu le baccalauréat à Kédougou, le jeune homme suit une licence d’anglais à l’université Cheikh-Anta-Diop de Dakar, où il se rend compte avec surprise que personne ne connaît sa langue ou sa culture. « J’ai donc voulu m’exprimer pour les faire connaître à tous les Sénégalais », explique l’artiste. Il se lance alors dans une école d’audiovisuel qui le mène à un poste de vidéaste dans une télévision privée sénégalaise, la DTV. Il arrive à y réaliser un documentaire sur son village. Mais il veut pousser la démarche plus loin en étant « plus universel. »

En 2018, il décide alors de se tourner vers la musique, où il mélange des mélodies chantées dans sa langue avec de la musique moderne, comme de l’afrobeat, de l’afro-house ou du reggae. « J’essayais de voir ce qui était à la mode parce que mon but était d’abord d’avoir une audience. Même si les gens ne comprennent pas ce que je dis, le beat et l’instrumental vont capter l’attention du public », explique celui qui a diffusé une dizaine de morceaux autoproduits sur ses réseaux sociaux.

Les paroles des titres reprennent les chants entonnés en rentrant des travaux aux champs ou des extraits de contes que sa grand-mère lui racontait le soir au coin du feu. « Face aux nouvelles technologies, comme la télévision et le téléphone, je me bats pour que survivent nos histoires et nos traditions orales », assure l’artiste, qui a fait un premier concert en 2019 à Bandafassi pour partager son travail avec sa communauté.

En 2020, il se fait repérer par hasard dans son village par Cortega, directeur artistique et cofondateur du collectif ElectrAfrique« Sa démarche m’a touché. Il méritait d’être connu davantage. J’ai bien aimé qu’il expérimente différents styles musicaux. Il a les capacités de s’adapter à des esthétiques différentes », témoigne le DJ, pour qui le fait qu’il chante dans sa langue maternelle est un point fort pour intégrer le collectif ElectrAfrique, qui rassemble des DJs de l’Afrique et de la diaspora depuis dix ans.

Beni Fadi glisse donc de plus en plus vers la musique électronique, en travaillant sur un EP pour faire des sons originaux, financés par le Goethe Institute, en collaboration avec les collectifs ElectrAfrique et Rise. « À Bandafassi, nous avons enregistré les clochettes, les tambours et les instruments traditionnels bédiks pour les faire fusionner avec la musique électro », se souvient Beni Fadi, qui a d’abord présenté les trois titres à Dakar et à Bandafassi avant de faire une petite tournée en Europe. « À Dakar, j’étais accompagné sur scène par des danseuses Bédik qui étaient habillées avec les costumes et coiffes traditionnelles », raconte fièrement Beni Fadi.

Pour la suite, le musicien espère porter son projet le plus loin possible pour faire perdurer sa langue et sa culture en l’adaptant au monde moderne. Il espère aussi qu’un jour les écoles de son village feront des cours en mënik et qu’un forage sera creusé pour amener l’eau en haut de la montagne, afin que les populations ne s’exilent plus, ailleurs dans le pays où elles perdent leur langue et leurs traditions en se mêlant au reste de la population sénégalaise. « Je ne veux pas être témoin de leur disparition », martèle-t-il.

Écouter l’EP Farkoko

 

Publié par Théa Ollivier

[Photo : Orstudio – source : http://www.rfi.fr]

A partir del 1 de septiembre hasta el 8 de diciembre de 2022, cada jueves se emitirá el ciclo virtual de conferencias “Migraciones al Paraguay entre los siglos XIX y XXI”, que a lo largo de sus 15 sesiones propone al público paraguayo e internacional un acercamiento a la historia de las migraciones al Paraguay a lo largo de la historia contemporánea del país, desde su independencia a la actualidad.

El ciclo está organizado por el Centro Cultural de España Juan de Salazar (CCEJS), el Comité Paraguayo de Ciencias Históricas (CPCH) y el Departamento de Historia Contemporánea de la Universidad Autónoma de Madrid (UAM). El ciclo está coordinado y presentado por el historiador español Eduardo Tamayo Belda (investigador de la UAM y miembro del CPCH), y producido por la comunicadora paraguaya Viviana Valdez (CCEJS).

Los objetivos del ciclo son cinco:
 Contribuir a la difusión de investigaciones sobre la historia de las migraciones al Paraguay.
 Poner en valor la relevancia que esa recepción migratoria tuvo para el país en cada contexto.
 Estimular la reflexión sobre la inserción internacional del Paraguay a lo largo de la historia, como un lugar receptor de migración y como parte también de procesos históricos globales.
 Generar un espacio de encuentro para investigadores/as sobre las migraciones, y además estimular el interés de jóvenes estudiantes en estos aspectos de la investigación histórica.
 Aprovechar la experiencia para consolidar grupos de trabajo y desarrollar posteriormente otros ciclos en esas u otras temáticas en torno a la inserción internacional del Paraguay.

Las quince sesiones del ciclo pueden seguirse a través del canal de YouTube del Centro Cultural Juan de Salazar, cada jueves a las 17:00h, desde septiembre a diciembre.

Las conferencias tienen una duración aproximada de una hora, en la que a la disertación de la ponente invitada o del ponente invitado le siguen unos últimos comentarios del presentador con el objetivo principal de motivar y estimular futuras investigaciones en torno a la cuestión abordada, gracias al conocimiento que cada ponente tiene en su campo, al compartir con el público una parte de su experiencia de investigación y de posibles líneas de estudio abiertas.

Este ciclo de conferencias virtuales titulado “Migraciones al Paraguay entre los siglos XIX y XXI” continúa la experiencia de trabajo y la voluntad de difusión cultural y de aliento de nuevas investigaciones de dos ciclos previos de ponencias, también virtuales, que fueron desarrollados a lo largo del último año: entre marzo y agosto de 2022 se ha emitido el ciclo de conferencias titulado “Migraciones hispanas al Paraguay a lo largo de la historia”, con seis sesiones sobre la diáspora española al país, desde la conquista hasta mediado el siglo XX; asimismo, en 2021 había sido realizado un primer ciclo de charlas virtuales sobre los “Vínculos culturales entre España y Paraguay desde la historia y la literatura”. Estos dos ciclos de ponencias emitidos anteriormente fueron proyectados y organizados por la Embajada del Paraguay en España, con la participación y financiación del Centro Cultural Español en Asunción y la colaboración de la Universidad Autónoma de Madrid. Este ciclo que aquí se presenta continúa los objetivos diseñados para sendas actividades previas.

La sesión inaugural del ciclo “Migraciones al Paraguay entre los siglos XIX y XXI” será presentada por el pedagogo Julián Egea (responsable de programas del CCEJS), de la historiadora paraguaya Anahí Soto Vera (vicepresidenta del CPCH) y del historiador y coordinador del ciclo Eduardo Tamayo Belda (por la Universidad Autónoma de Madrid).

El 2 de septiembre se cumplieron 77 años de la finalización de la Segunda Guerra Mundial, un trágico acontecimiento que supuso cambios profundos en el pensamiento, la cultura, la política y la economía a nivel global, un conflicto que afectó —directa o indirectamente— a casi todas las sociedades del globo, y cuya finalización permitió descubrir los horrores que el fascismo internacional estaba provocando. Entre estos horrores cobró especial significación el genocidio sobre el pueblo judío por parte del régimen nazi. El Holocausto —palabra que del griego al castellano puede traducirse como quemarlo todo— provocó la migración de millones de judíos a lo largo y ancho del planeta desde comienzos de los años treinta de la pasada centuria. Algunos de aquellos migrantes judíos llegaron al Paraguay, y en esta primera sesión el ciclo se propone conocer la experiencia en Paraguay.

Para ello, en la primera sesión del ciclo (que se emitió el jueves 1 de septiembre) han sido invitados el historiador paraguayo David Velázquez Seiferheld y el politólogo alemán Gerhard Reinecke, quienes disertaron en esta primera conferencia sobre la historia de la migración judía hacia Latinoamérica en el contexto de auge del fascismo en Europa, y abordaron específicamente un caso familiar de migración judía al Paraguay en un momento histórico muy complejo para este colectivo, cuando en territorio europeo existía una fuerte represión y persecución hacia el mismo, mientras que la llegada al Paraguay tampoco fue sencilla, al existir por entonces duras restricciones para la entrada de población judía a territorio nacional de varios países latinoamericanos.

Programación:

1/9 – David Velázquez Seiferheld  y Gerhard Reinecke – Presentación y sesión inaugural del ciclo – Migración judía al Paraguay.
8/9 – Emi Kasamatsu  Migración japonesa al Paraguay.
15/9 – Luis Verón  Migración rusa al Paraguay.
22/9 – Rosa Isabel Martinez Lillo  Migración árabe al Paraguay.
29/9 – Roberto Zub Kurylowicz  Migración eslava al Paraguay.
6/10 – Sebastián Bruno  Migración argentina al Paraguay.
13/10 – Sylvain Souchaud  Migración brasileña al Paraguay.
20/10 – Guido Rodríguez Alcalá  Migración francesa al Paraguay.
27/10 – Juan Carlos Herken Krauer  Migración británica al Paraguay.
3/11 – Margarita Memmel de Goligorsky   Migración alemana a Paraguay.
10/11 – Thilo F. Papacek  Migración menonita al Paraguay.
17/11 – Edith M. Arrúa Sosa  Migración venezolana al Paraguay.
24/11 – Martín Romano García   Migración italiana al Paraguay.
1/12 – José Manuel Azcona Pastor  Migración española al Paraguay.
8/12 – Elisa Filippini – Migración al Paraguay: estado y prospectiva.

 

 

[Fuente: http://www.juandesalazar.org.py]

Ana Arzoumanián (CC).

Ana Arzoumanián (CC)

Son escasas las poblaciones de las que puede decirse, sin temor a equivocarse, que están marcadas ante todo por la errancia. Ya sabemos que los judíos hicieron de su errancia el principio constitutivo de su identidad, al menos hasta que acaeció, en 1948, la conformación del Estado israelí.

Sin embargo, otras poblaciones, por razones históricas y políticas diferentes, fueron obligadas a una errancia comparable. Muchos armenios, fundamentalmente desde 1915, año en que se inició el genocidio, se vieron forzados a emigrar para sobrevivir. Sin embargo, entre 1922 y 1991, Armenia formó parte de la Unión de Repúblicas Socialistas Soviéticas («cuatro palabras, cuatro mentiras», supo sintetizar brillantemente Castoriadis), de tal forma que la sobrevivencia de este pequeño país, atrapado entre el nuevo imperio encabezado por Rusia y el depuesto Imperio otomano, fue un «milagro» sostenido por una lengua y una cultura tenaces, donde la religión desempeñó un papel de primer orden.

El holocausto armenio careció del reconocimiento que alcanzó el holocausto de los judíos, por tanto, ellos debieron asumir por sí mismos la tarea de perpetuar la memoria de estos crímenes. Cada uno de estos miembros parece haber recibido el legado de aquellos que fueron barridos de la faz de la tierra, para que, de alguna manera, esta ausencia fuera revertida. Sus escritores y artistas, obviamente, ocuparon un lugar preponderante en este proceso. ¿No son justamente ellos los depositarios de una memoria colectiva que debe atravesar numerosas capas de silencio para hacerse oír? Antes que una creación, el arte y la literatura se convirtieron en un mandato.

Ana Arzoumanián (1962) es, sin lugar a duda, por la complejidad y la profundidad que imprimió a su vasta obra, la escritora más lúcida vinculada a la comunidad armenia («escribo para desenterrar»). Sus textos suscitan numerosas asociaciones porque están entrecruzados por diferentes dimensiones que no han quedado limitadas al mundo que le dio origen. Esta riqueza es variada y múltiple. A mi juicio, estos textos no quedan nunca circunscriptos a una perspectiva única, sino a fecundas variaciones y variantes, sustrato del procedimiento barroco, en el alto sentido del término. Ella misma ha expresado con claridad una parte fundamental de este proceso:

Vengo estudiando el genocidio armenio desde que era chica, desde primaria. Es más, mi abuela, en lugar de contarme cuentos infantiles, me contaba relatos del genocidio. Relatos del espanto: de cómo les cortaban las cabezas, de cómo sobrevivían tomando el orín de la compañera, etc. Era pequeña y no entendía del todo la crueldad de esas narraciones. A todo esto, en el colegio se le agregó la pulsión reivindicatoria […] De algún modo, la escritura cumple una función de atravesar cierta justicia poética. Allí, en ese campo, asumo la crueldad del mundo.

Una lengua jamás absuelta

La comunidad armenia que pudo establecerse en Argentina fue relativamente importante: la tercera mayor del mundo, según las frías estadísticas. Esta diáspora no impregnó al país de las huellas que dejó la comunidad judía, pero se abrió paso en los diferentes estratos que conforman nuestra sociedad.

A lo largo de las tres últimas décadas, Arzoumanián fue conformando y delineando una voz sumamente personal, con una fuerza y una intensidad que en ocasiones roza la violencia; una voz tan poco común, que bien puede decirse que no obstante su marca comunitaria, ella pertenece por derecho propio a lo mejor de las voces de su generación en nuestra lengua, una lengua conquistada, incorporada, asumida, adquirida en la ardua tarea de reconfigurarse y metamorfosearse.

Durante toda su infancia, su lengua principal —y casi única— fue el armenio. Sus padres habían nacido ya en Argentina, aunque eso no les impidió aferrarse a su lengua como un náufrago a su tabla de salvación, fenómeno poco frecuente en una Argentina que se caracterizó por una fuerte tendencia de asimilación lingüística. En los hechos, fueron pocas las comunidades que trataron de preservar deliberadamente su lengua de origen.

Por otra parte, pocas veces tenemos la oportunidad de encontrarnos con un/a escritor/a que tenga una conciencia tan ajustada y aguda de su propio proceso creativo y de la asimilación de la lengua que terminará siendo la suya. No se puede menos que relacionar esta primera vivencia de lenguas, que nunca le pertenecerán totalmente, ni siquiera en la intimidad, con esos magníficos ensayos de Elías CanettiLa conciencia de las palabras, y con el primer volumen de su vasta autobiografía: La lengua absuelta, para no hablar de Masa y poder, que cada tanto resuena en los ensayos de Arzoumanián. Ella misma narró la vivencia de su separación y diferenciación:

En ese barco que no cruzaba ningún océano, ese barco que no terminaba de arribar a ningún puerto, a los argentinos se los llamaba casti o deghatsiCasti venía de castizo; y deghatsi de lugareño, nativo. Cuando íbamos hasta la heladería que quedaba a dos cuadras del colegio con las compañeras hablábamos en armenio para que no nos entendieran. Si algún chico nos miraba en la calle, entre nosotras nos alertábamos: «No miren, es un pis casti». Que era una forma despectiva de catalogar a los que no eran de la comunidad, un calificativo que de manera poco feliz intentaba evitar la asimilación del grupo encerrando la lengua, desafectándola, mordiéndose.

El estar y el no estar es un núcleo indisoluble de los exiliados y de los que se vieron forzados a abandonar lo que tímidamente podría denominarse una patria. Ya lo dijo Joyce con macabra ironía: «La patria es un entretenimiento de emigrados». O Cioran, yendo aún más lejos en su despojamiento: «Un escritor que se precie no tiene patria. Una patria es un engrudo». La tensión entre el ciudadano del mundo y el que necesita de sus raíces para sobrevivir ha sido para Ana Arzoumanián un largo proceso de reflexión.

La experiencia poética en que ha devenido su historia personal y familiar ¿le ha sugerido acaso que detrás de un exilio siempre existe la posibilidad de un enriquecimiento de lo que nos brinda el mundo y no solo un sentido de la pérdida? Además, ¿por qué sería ella, una armenia de tercera generación, una desarraigada, una desterrada, o una «transterrada», en el lenguaje de José Gaos? De esta ambigüedad extrema, que los artistas y escritores descubren como uno de los elementos centrales de la condición humana, al punto de precisar ella que «no distingo la herencia de la identidad», la escritora extrae su propio mundo simbólico.

En su libro de ensayos El depósito humano: una geografía de la desaparición lo señala con precisión:

Muchas veces la diáspora se traduce como exilio, destierro que alude a las nociones de culpa y redención, al abandono o a la nostalgia de una patria. («No obstante, harás que regresen mis huesos en urna pequeña; así́ también muerto yo no seré exiliado», Publio Ovidio Nasón, Las tristes.) Hacer lugar a ese transporte incesante de uno a otro extremo a lo largo de un camino que se expande; entendemos la dimensión de la experiencia estética como espacio de la heterogeneidad discursiva, fragmentos yuxtapuestos de voces. Constelación semántica que se apoya en adyacencias. Sobre este trasfondo el yo es un tener lugar que dura mientras construya acontecimientos. Carácter múltiple, móvil y comunicante de la individualidad: su rasgo implicado.

Retengamos por un momento «la experiencia estética como espacio de la heterogeneidad discursiva, fragmentos yuxtapuestos de voces» que parece ser, expresado en un nivel teórico transparente, el proyecto estético central de Arzoumanián. En efecto, la inmensa yuxtaposición de niveles que siempre poseen los procesos históricos, aunque no sea por la diversidad de tiempos que los constituyen, se revela también en esta escritura hecha de sangre y ternura, de cataclismos como de cuerpos imbuidos de erotismo, de torturas como de goce extremo.

¿No es el cuerpo acaso el lugar donde todo tiene lugar y donde todas las cosas ocurren? Solo la tajante separación establecida principalmente por san Agustín —de acuerdo con su interpretación platónica— entre cuerpo y alma puede haber producido semejante distorsión en relación con las muchas culturas distintas a las derivadas del cristianismo. En esta poetisa, las palabras lavan la carne como los empleados de los mataderos limpian los restos después de la faena.

«Yo no cambio de opinión, cambio de cuerpo», afirma el personaje de su primer texto narrativo, La mujer de ellos. El cuerpo, aquí, se confunde con la geografía. En una entrevista reciente, con motivo de la aparición de su libro La Jesenská, la respuesta es lapidaria y conmovedora: «Vengo de un hueco, de un blanco, de un vacío. Vengo de una diferencia horaria de siete horas. Vengo de atravesar dos continentes, un mar y un océano. Vengo de la confusión». Pero quizá lo fundamental de la condición humana sea estar atravesados por la confusión y por preguntas sin respuesta.

Con frecuencia, el uso del contraste que hace Arzoumanián le sirve para amplificar el efecto y la percepción de la catástrofe inicial de su cultura (el genocidio armenio), pues, en el fondo, ¿las catástrofes no devienen lo indescriptible, lo que solo puede ser sufrido y experimentado a través del cuerpo?

Una estética del horror

Como se sabe, las últimas palabras de Kurtz, el siniestro personaje de El corazón de las tinieblas de Conrad, son: «¡El horror, el horror!». Ahora bien, este horror no tiene nada en común con la novela gótica, sino que expresa por medios metafóricos el inmenso proceso de exterminio que implicaban las «hazañas» coloniales. De una manera menos metafórica que Conrad, fue Vargas Llosa el que retomó la pintura de este horror en El sueño del celta, donde su personaje histórico, Roger Casement, asiste «horrorizado» a esta trituración de hombres efectuada en nombre de la «civilización».

El ser humano ha sido imaginativo en dotarse de numerosos pretextos para emprender la tarea de exterminar al otro. Por su parte, Ana Arzoumanián nos enseña, en su último libro de ensayos, que «la guerra es un verbo», como si hubiera querido sugerirnos que la propia escritura sobre el horror es un pretexto para hacernos acceder a lo que en otras sociedades se bautizaba con el nombre de «sacrificio». La demanda continua de sacrificios humanos, por parte de los aztecas, a expensas de sus vecinos, ha sido un motivo plausible para llevar a los tlaxcaltecas a aliarse con esos advenedizos llegados de Oriente para constituir, también de manera ambigua, el otro Occidente.

Esta indagatoria del horror, tanto en sus trabajos de ficción como en sus ensayos, a menudo desconcierta, pues en estos tapices y gobelinos no hay lugar para los ejes binarios.

Mis abuelos llegaron escapándose del genocidio. La familia materna (Karakashián- Kalaydjián) vino desde Gürün, y la paterna (Arzoumanián) desde Bursa. Mi abuelo paterno perdió a su primera esposa y a sus cuatro hijas […] Mi abuelo materno ha dejado esposa e hija, mi abuela: su esposo. Es ese estallido de lo familiar, allí donde no hubo un cuerpo para velar, ni sepultura donde llorar. Allí donde todos los escombros devinieron lugares de veneración como lugares posibles de encuentro de los restos, allí el arte. Quizá por eso mi literatura sea una literatura de escombros porque, de algún modo, me he convertido en una devota de las ruinas. La herencia armenia es vasta y no distingo la herencia de la identidad […] Y la reivindicación en mí ocupó un lugar más compasivo, si se pudiera utilizar ese término. Compasión con la víctima, para salir del lugar de la victimización eterna y compasión con ese mundo del horror no más horroroso que Ruanda o Sarajevo.

El descubrimiento de que el horror no queda circunscripto ni al ámbito armenio ni al familiar ha sido un salto estético, por llamar a esta experiencia de alguna forma, que le ha permitido la escritura de otros mundos, especialmente en Juana I y La Jesenská, obras de una gran fuerza poética, concebidas más allá de los géneros convencionales, donde el teatro, la novela y la poesía se dan cita para potenciarse. Entonces son las voces de la reina popularmente conocida como Juana la Loca y la de Milena Jesenská las que irrumpen para dar testimonio de sus cuerpos, del más allá de los límites y de lo indecible.

La incomprensión, el no entendimiento

Una identidad fugitiva, la transmutación, una perspectiva poliédrica, una visión caleidoscópica, se perciben en La Jesenská desde el comienzo. La autora nos explica (y en ella estos comentarios sobre sus textos forman parte del mismo proceso creativo) que «la primera palabra de La Jesenská —libro transgénero subtitulado “Poema”, esbozo dramático operístico— es una expresión en checo que significa “no entiendo”».

«Nechápu aparece en una carta que Kafka le envió a Milena. Y me pareció que ese “no entender” habla no solo del descalabro político en el que vivían, del desastre que se avecinaba, de la diseminación de fronteras, de la confusión de lenguas, de la delación de los vecinos, sino también nos dice acerca de la causa de lo poético. Hay una extranjería respecto de las cosas; para mí, escribir es ese modo aturdido en que se presenta el mundo frente a alguien que, en lugar de dejarse llevar por ese remolino, se distancia, observa, y se dice: “No entiendo”. Cada renglón de lo escrito implica vérselas con ese no entender. Además, esa casi perplejidad frente al mundo toca una escena muy primaria en mí. Yo era pequeña y no hablaba castellano, acompañaba a mi madre a realizar sus compras por el barrio, la gente me hablaba y yo, seria, le preguntaba a mi madre acerca de lo que me estaban diciendo. Diríamos que mi madre fue mi traductora porque yo no entendía.»

No es este el lugar adecuado para explayarme sobre algunos aspectos de La Jesenská, obra central en la producción de Ana Arzoumanián. Tal vez sea suficiente señalar que, contrariamente a las muchas referencias a Kafka que siempre se hicieron al hablar de Milena Jesenská, al punto de convertirla en un apéndice del inmenso escritor del siglo XX, la autora elude este vínculo para situar a su personaje en un campo de concentración, en el punto extremo de una existencia al borde de su disolución.

Al igual que un historiador que trata de reconstruir una época a través de las ruinas que examina, Ana Arzoumanián abre con devoción un sendero entre ellas para trazar un mapa de ese «bosque de símbolos» que no está más al alcance de su mirada. Hay huellas de una epopeya incierta en la elaboración de esta obra, donde el relato épico se desliza hacia algo anterior a la guerra, que es el deseo de comprendernos. Antes de Homero y de Gilgamesh están los relatos que nos explican por qué existe el mundo. Con frecuencia, eso es algo ininteligible para nuestra especie. «Hay un no entender que me constituye», nos dice casi poéticamente, como si nos hablara del fondo de los tiempos y desde una ignorancia esencial.

[Fuente: http://www.jotdown.]

System of a Down, 1999. Fotografía: Bob Berg / Getty. armar

Escrito por Virginia Mendoza

Hay un violín en el mundo que salva vidas. Primero fue la de Krikor, un joven armenio que nunca aprendió a tocarlo. Un día de 1915, un conocido le entregó su instrumento y le pidió que fingiera ser músico para salvarse. Era un lugar y un tiempo convulso: aquel año había empezado el genocidio armenio perpetrado por el gobierno de los Jóvenes Turcos en el Imperio otomano. Hacerse pasar por violinista, tal como aquel hombre le había indicado, permitió a Krikor llegar a Líbano y reiniciar su vida.

Varias décadas después, el hijo de Krikor trabajaba en un taller de televisiones de Beirut hasta que un bombardeo dejó devastado el edificio. Al perder su trabajo, acudió al violín que había salvado a su padre y consiguió hacer de él su profesión. El instrumento parecía tener algún tipo de poder en aquella familia y se lo impuso a su hijo pequeño, al que obligó a ensayar durante horas cada día. En plena guerra civil libanesa (1975-1990), el nieto de Krikor pasaba su infancia escondiéndose en refugios antiaéreos. Al principio, escuchar la sirena y correr hacia el refugio era como un juego para él. Un día, mientras tocaba el violín en el garaje, todos a su alrededor empezaron a cantar y a bailar y entendieron que ahí estaba la clave: la música podía cambiarles el ánimo. Trajeron más instrumentos al garaje y se alargó la fiesta. Fingir que eran felices haciendo música les ayudó a recuperar la esperanza y salir adelante entre bombas, ratas y cucarachas.

En una de las treguas de una guerra que se prolongó quince años, el nieto de Krikor dio su primer concierto en Beirut. Tenía doce años cuando entendió que su vida, aunque seguiría estando marcada por los garajes, estaría ya para siempre en los escenarios. Se enamoró de aquel instrumento que su padre le había enseñado a tocar a la fuerza. El joven no sabía por qué a su abuelo le habían dado el apodo de Krikor «el Bailarín», si era tan serio que en su familia sospechaban que sufría una especie de parálisis facial. Tampoco supo, mientras Krikor vivió, que a su abuelo le salvaron la vida tanto un violín como un conocido que se jugó la vida por él en un lugar y un tiempo en el que ayudar a un armenio equivalía a ser armenio y tenía las mismas consecuencias.

Tenía quince años, la misma edad con la que su abuelo se salvó, cuando consiguió escapar de la guerra gracias a una beca para estudiar en Hannover. En su intento desesperado por ser aceptado se alisó el pelo, se depiló las cejas, se inventó que Paganini había tocado su violín y trabó una amistad que sería difícil de explicar en casa: su único amigo era turco. El chico se aferró a su instrumento porque se había convertido en la llave para entrar en un país en paz.

Su vida transcurrió de un lado a otro a partir de entonces. En Londres se incendió su casa y solo pudo salvar el violín de su abuelo. Aprendió ocho idiomas, se sintió de todas partes y de ninguna y se afincó en España. Desde allí volvió a viajar con su violín y se fue a las montañas armenias a conocer la tierra de sus antepasados. Llegó a un país marcado por el recuerdo de un genocidio negado, de una guerra reciente, y protagonizó el documental Armenio (2010), que dirigió Emilio Aragón. Él mismo lo entrevistó para El País hace años, y el nieto de Krikor le dijo que la música no puede parar las guerras, pero reconoció que, indirectamente, sí puede hacerlo: «Tiene el poder de sensibilizar, y así, quizá, sí puede parar guerras».

Convertido ya uno de los mejores violinistas del mundo, el nieto de Krikor, Ara Malikián, se lanzó a los escenarios para contar la historia del violín que lleva más de un siglo salvando a su familia.

Música para la guerra

En 2013, cuando vivía en Armenia y recorría pueblos en busca de historias para escribir un libro sobre el país caucásico, me reuní con un grupo de más o menos una veintena de hombres y una mujer. Todos tenían algo en común: eran nietos de quienes habían perdido todo durante el genocidio armenio. Esa era la razón por la que combatieron en la primera guerra de Nagorno Karabaj (1988-1994). Se dijeron a sí mismos que nadie les seguiría arrebatando la tierra de sus abuelos y fueron a luchar con armas precarias que fabricaron con sus propias manos. Había pasado una década desde el alto el fuego cuando los conocí, pero aún no había un acuerdo de paz y estaban dispuestos a tomar las armas de nuevo si la guerra volvía a estallar. Y volvería a estallar.

Sus testimonios se alternaban y complementaban en una entrevista conjunta en la que no ocultaron que me iban a contar «lo mismo [que los azeríes, a los que llaman “turcos”], pero al revés». De pronto, uno de ellos dijo: «Pero entre los que hacíamos la guerra también teníamos cantantes. Dos de ellos están aquí». Uno de los dos habló por primera vez para decir unas palabras que se me quedaron grabadas y a las que, aunque en armenio no sonaban igual, la traducción al castellano dotaba de una aparente pretensión poética: «Cantábamos para dar fuerzas. Uno no solo se arma con armas, también se arma el alma. Y el alma se arma con canciones». Terminó de decir aquello y empezó a cantar. Otros se unieron a él y posteriormente recordaron cómo la música les sirvió para unir a los suyos durante la guerra y cómo aquellas canciones, que eran ya canciones viejas, canciones de sus abuelos, renacieron en esa época y todavía resonaban en las bodas por si algún día volvían a ser necesarias en la guerra. Ya lo decía Garegin Njdeh, un poderoso estratega militar: «Muchas veces vencemos con el canto».

Desde tiempos de los romanos hasta la Segunda Guerra Mundial, la música y la guerra siempre han ido unidas, ya sea para conectar a los que están en el frente con su hogar y alentarlos como para torturar al enemigo. Ni Armenia ni Azerbaiyán fueron la excepción en la década de 1990 y, cuando la guerra volvió a estallar en septiembre de 2020, ambas partes contaban con algo más que cantantes en el frente. Con la ayuda de las plataformas musicales y de las redes sociales, extendieron la guerra muy lejos de sus fronteras. A la ciberguerra de aquel mes se unió una guerra musical a base de metal. La banda azerí Nur Group lanzó «Atəş» («Fuego»), su propia llamada a las armas a través de un videoclip de estética bélica. Casi inmediatamente, como si de una réplica o de un contraataque se tratara, System of a Down lanzó «Protect the Land» y «Genocidal Humanoidz» después de quince años de silencio. Ambas canciones estaban destinadas a difundir la causa de su pueblo y a recaudar fondos para la organización de la diáspora Armenian Fund, con sede en California. Entre armenios y azeríes nada es nunca casual ni nuevo: si bien se trataba del mayor episodio de violencia desde la guerra de los años noventa, el de septiembre de 2020 fue un capítulo más de un enfrentamiento que, durante más de un siglo, ha ido reduciendo en el mapa el territorio históricamente habitado por los armenios. Hoy dispersos por el mundo, su diáspora triplica en número a los tres millones que viven en Armenia y Nagorno Karabaj. Aquellos que se lanzaron a pedir a los suyos que protegieran la tierra no solo eran miembros de una de las bandas de metal estadounidense de referencia: son, como aquellos veteranos de guerra que se armaban con canciones, nietos de supervivientes del genocidio armenio.

El gesto no era nuevo. Las letras de System of a Down siempre han hablado de aquel genocidio y sus miembros han usado la música para denunciar el silencio y exigir su reconocimiento. En sus proyectos paralelos, Serj Tankián y Daron Malakián —vocalista y guitarra— han seguido por los mismos derroteros. En el tema «Lives», Malakián habla del genocidio y del baile en la misma canción. Parece ilógico hasta que una entiende que el armenio canta y baila mientras recuerda sus pérdidas porque la música, y no solo la memoria, lo conecta con sus ancestros. Por eso bailan las mismas canciones en la guerra y en las bodas.

Música para la paz

Desde el 27 de septiembre de 2020, Susanna Movsesyán, las mujeres de su familia y sus vecinas vivieron más de un mes en los refugios subterráneos de Stepanakert (la capital de Nagorno Karabaj) mientras la aviación azerí bombardeaba el enclave. La mirada desesperada de Susanna recorrió las redes y circuló por cuentas armenias de Facebook gracias a un retrato del fotógrafo Roberto Travan. Uno de esos días, en mi timeline no solo aparecían sus ojos, sino sus manos. Se movían con delicadeza sobre las teclas de un piano. Susanna se grabó tocando una pieza de Chopin y lo compartió con el mundo en mitad del miedo y del dolor, mientras otras vecinas cantaban y bailaban en los refugios al igual que lo hicieron décadas antes otros armenios en Beirut.

Esa es una de las respuestas más inesperadas, aunque común, del ser humano bajo las bombas. Creemos que cuando ocurra entraremos en pánico y solo habrá lugar para la violencia, pero, a menudo, más de lo que puede parecer, algunas personas responden con belleza, empatía y humor.

Como aquellos ingleses que bajo las bombas alemanas colocaron un cartel a la puerta de su tienda que decía: «Estamos más abiertos que nunca». Como el armenio que, según me contó su nieta, comentó el bombardeo de su pueblo como si de un partido de fútbol se tratase, en un pueblo fronterizo que aún se enorgullece de que un poeta parase una batalla entre armenios y azeríes a principios del siglo XX. O los armenios que no estaban en el frente en esta última guerra y convirtieron al enemigo en carne de meme, o se sentaron ante un piano o un violoncelo para compartirlo en las redes. Hasta en la situación más extrema, los armenios hacen siempre tres cosas: música, chistes y jorovats (barbacoa). Lo pudimos ver esos días en las redes sociales, en aquella ciberguerra en la que predominaron la música y los memes. En uno de esos chistes, un misil hacía las veces de barbacoa.

El día que volvió a estallar la guerra, Vahagn Abaghyán tenía dieciséis años y apenas llevaba tres semanas estudiando música. Desde pequeño supo que sería músico por las emociones que le provocaba escuchar a su abuelo tocar el shvi, un tipo de flauta armenia, y a los ocho años acudió a una escuela de música para aprender a tocar la trompeta. A los dieciséis, volvió a inscribirse para alcanzar un nivel superior, pero la guerra cambió sus planes. Al principio se escondió con su familia en un refugio subterráneo de Stepanakert, pero en solo unos días decidieron marcharse a Ereván, la capital de Armenia. Apenas recogió algo de ropa, su documentación y la trompeta. Al llegar descubrió que no disponía de espacio para ensayar y, convencido de que la guerra había truncado su sueño de estudiar música, se unió a otros chicos para tocar en las calles de Ereván. Un día pasó ante ellos el director de una escuela de música que les ofreció la oportunidad de tocar con otros jóvenes refugiados. Cuando creía que la guerra había acabado con sus sueños, descubrió que la música acababa de salvarlo.

La música siempre es el arma de los armenios, especialmente, contra el silencio y el olvido. Por eso, en aquel otoño de 2020, un violoncelista armenio llamado Sevak Avanesyán se grabó interpretando «Krunk» de Komitas Vardapet en la Catedral de Ghazanchetsots, de Shusha, cuando acababa de ser bombardeada. Esa fue su respuesta del músico al ejército azerí y todos los armenios entendieron el mensaje: no hay bombas que puedan acabar con la música armenia. William Saroyán, estadounidense de origen armenio, escribió que allá donde se junten dos armenios nacerá una nueva Armenia. Y allí estaban Komitas y Sevak, regalando belleza entre los escombros, al igual que lo hicieron la Orquesta Filarmónica y el Coro de la Catedral de Sarajevo cuando interpretaron el Réquiem de Mozart en las ruinas de la biblioteca de Sarajevo recién bombardeada. Los armenios ya sabían del poder de la música, y la última guerra les recordó que siempre estará con ellos: mientras sentían que su grito desesperado iba a parar al vacío, que el mundo les daba la espalda, una pieza de Komitas interpretada en un templo bombardeado se hacía viral y les devolvía la esperanza.

Komitas sobrevivió al genocidio armenio. En su tiempo se dijo que había perdido la cabeza. Hoy, posiblemente, le diagnosticarían estrés postraumático. Komitas, que siempre tocaba el piano bajo un cuadro del monte Ararat, es hoy un símbolo nacional. Su rostro está en los billetes de diez mil drams y en los sellos; su obra «Chinar es» suena de fondo en la sección meteorológica de la televisión armenia y Monserrat Caballé, que viajó por Armenia y Karabaj, interpretó «Krunk» en un álbum sobre Armenia. El mero hecho de visitar el enclave la convirtió en persona non grata en Azerbaiyán. Así arrancó una campaña de desprestigio contra la soprano catalana.

Durante los días que duró la última guerra de Karabaj, «Krunk» se convirtió en una especie de himno armenio. Un himno por la paz, la resistencia y la unión. «Krunk», en armenio, significa «grulla». Lo que cantó Montserrat Caballé y lo que no cantó Sevak dice algo así:

Grulla, ¿de dónde vienes?

Estoy pendiente de tu voz.

Grulla, ¿no tienes noticia alguna de nuestra tierra?

No me has dado ninguna respuesta, te has ido.

Grulla, aléjate, vete de esta tierra.

La primera vez que fui a un concierto en Ereván, la mujer que estaba a mi lado sacó una cartulina y empezó a cortarla con gran esmero. No recuerdo qué sonaba, pero sí mi emoción cuando la mujer se dirigió a mí y extendió su obra de arte. Era un ave que, dibujada minuciosamente a base de tijera escolar, cargaba una cría en su pico. No sé qué significó aquello, pero me pareció lo bastante simbólico como para guardarlo en la cartera y llevarlo siempre conmigo. Quizá sea una grulla. Me gusta pensar que lo es.

 

[Fuente: http://www.jotdown.es]

Le président israélien Isaac Herzog était l’invité d’honneur de la commémoration du premier Congrès Sioniste mondial qui avait eu lieu à Bâle il y a 125 ans, marquant un tournant décisif dans l’histoire du sionisme.

Theodor Herzl en 1901, sur le balcon de l’hôtel „Drei Könige“ à Bâle

Organisée par la World Zionist Organization (WZO), la manifestation, à laquelle ont participé plus de 1 000 invités, s’est tenue 125 ans après la conférence sur trois jours de 1897 au cours de laquelle Theodor Herzl a parlé devant plus de 200 délégués et « fondé l’État juif ». À l’occasion de cet événement, la ville avait pris des mesures de sécurité drastiques. Parmi les orateurs, citons Miriam Adelson, l’ancien chef du Mossad, Yossi Cohen, qui dirige aujourd’hui les opérations de la Softbank en Israël, le président de l’Agence juive, Doron Almog, le chef de l’Anti-Defamation League (ADL), Jonathan Greenblatt, le ministre de la Diaspora, Nachman Shaï, et la baronne Ariane de Rothschild, présidente du groupe Edmond de Rothschild.

Durant son séjour, Isaac Herzog a rencontré des membres du gouvernement de la confédération, dont le président Ignazio Cassis, ainsi que des membres du gouvernement cantonal de Bâle et des membres de la communauté juive. La rencontre entre Isaac Herzog et Ignazio Cassis doit déboucher sur un « accord révolutionnaire » entre les fondations pour la science israélienne et suisse.

Le premier congrès sioniste était d’abord censé se dérouler à Munich. Il n’y a pas eu lieu à cause du refus très ferme de l’association rabbinique allemande et du comité directeur de la communauté israélite de Munich. La ville de Bâle fut donc choisie comme alternative et le congrès, organisé par David Farbstein, un proche de Theodor Herzl et futur conseiller national suisse, s’y tint du 29 au 31 août 1897. Dans le programme formulé il y a 125 ans, on peut lire entre autres : « Le sionisme vise à établir en Palestine une patrie qui soit garantie par le droit public pour les Juifs qui ne peuvent ou ne veulent pas s’assimiler ailleurs ».

[Photo : Ephraim Moses Lilien, gemeinfrei, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=2209998 – source : israelentreleslignes.com]

Publicam en seguida una adaptacion occitana d’un article de Vijay Mishra publicat originàriament en anglés dins The Conversation. Mishra es professor emerit d’anglés e de literatura comparada a l’Universitat Murdoch, a Perth (Austràlia).

Salman Rushdie es estat un ardent defensor de la libertat d’expression dels escrivans © NDZ STAR MAX IPx/AP

L’institucion Chautauqua, al sud-oèst de Buffalo dins l’estat de Nòva York, es coneguda per sas conferéncias d’estiu — e coma un luòc ont las gents van cercar la patz e la serenitat. Salman Rushdie, lo grand escrivan e intellectual public influent, i aviá ja parlat abans.

Lo divendres 12 d’agost, foguèt convidat a parlar sus un subjècte que li tocava plan lo còr: lo sòrt dels escrivans en Ucraïna e la responsabilitat etica dels estats nacion liberals envèrs eles. Rushdie es estat un ardent defensor de la libertat d’expression dels escrivans durant tota sa carrièra.

Dins lo public de mai o mens 2500 personas a Chautauqua se trobava Hadi Matar, 24 ans, de Nòva Jersey, que sautèt sus l’empont e escotelèt Rushdie al còl e a l’abdomen.

La fatwa e l’espèctre de la mòrt

Se passèt fa mai de 30 ans —lo 14 de febrièr de 1989 (jorn de Sant Valentin)— quand l’aiatollà Ruhollah Khomeini, 88 ans, alavetz dirigent esperital d’Iran, condemnèt Rushdie a mòrt per mejan d’una fatwa, una decision legala en vertut de la sharia. Son crime èra d’aver blasfemat contra lo profèta Maomet dins son roman Los versets satanics , per divèrsas rasons.

La mai seriosa èra la suggestion que Maomet non solament editèt lo messatge de l’àngel Jibril (Gabriel) mas que lo quite Satan intervenguèt per tal de desformar aquel messatge. Aquò, de segur, se presenta coma de remembres allucinatòris pel personatge aparentament destimborlat del roman, Gibreel Farishta. Mas en rason d’una cresença comuna en l’identitat partejada de l’autor e del narraire, l’autor es reputat responsable de las paraulas e de las accions d’un personatge. E aital l’autor foguèt condemnat.

Las primièras paginas de l’edicion del 13 d’agost 2022 dels jornals iranians. Se pòt legir “Lo cotèl dins lo còl de Salman Rushdie” © Vahid Salemi/AP

De blasfemar contra Maomet es un crime imperdonable dins l’islam: una sòrta de santetat divina entorneja lo Profèta de l’Islam. Aital se mòstra dins una dicha farsi fòrça coneguda, با خدا دیوانه باشوبا محمد هوشیار Ba khuda diwana basho; ba Muhammad hoshiyar (Siá fòl amb Dieu, mas prudent amb Maomet).

Après la fatwa, l’espèctre de la mòrt a seguit Rushdie — e el o sabiá, quitament quand lo govèrn iranian ostensiblament retirèt son sosten a la fatwa (mas sens l’estapa importanta d’admetre qu’una fatwa emesa per un erudit qualificat de l’islam —qu’èra Khomeini— podiá èsser revocada.) Rushdie, el meteis, aviá pas pres seriosament las menaças ocasionalas contra sa vida. Aviá viscut mai liurament aquestas darrièras annadas, en se dispensant sovent dels gàrdias de seguretat afectats a sa proteccion.

E mai li ajan levat la respiracion assistida, las nafras de Rushdie son totjorn grèvas. Coma o diguèt son agent Andrew Wylie, risca de pèrdre un uèlh e saique quitament l’usatge d’un braç. Se restablirà, mas sembla pauc probable que torne coma lo contaire qu’èra (coma l’ai conegut durant mas vesitas a l’Universitat Emory, en Georgia, ont pendent cinc ans, de 2006 a 2011, foguèt escrivan en residéncia de tèrme cort, e ont sos archius èran estats installats).

Expausar las linhas de division entre l’Èst e l’Oèst

Sabèm pas çò qu’a motivat Hadi Matar a agir d’aquel biais, mas son accion pòt èsser dissociada de la fatwa de 1989, raportada per la revista Time dins un article principal entitolat « Hunted by An Angry Faith: Salman Rushdie’s novel cracks open a fault line between East and West” (Percaçat per una fe emmaliciada: lo roman de Salman Rushdie dobrís una linha de division entre l’Orient e l’Occident).

Rushdie arribèt a la primièra pagina de Time lo 15 de setembre de 2017, quand la revista lo presentèt e faguèt l’elògi de son nòu roman, The Golden House (L’ostal daurat). Dins lo perfil, Rushdie sosquèt a l’efièch de la fatwa e de la controvèrsia a l’entorn dels Versets satanics sus la percepcion que las gents an de son escritura. L’umor de sos libres èra estat negligit, e sas òbras posterioras avián començat d’aquerir “l’ombra de l’atac” suls Versets satanics.

Los versets satanics foguèron publicats fa mai de 30 ans — qualques ans abans la naissença de l’agressor de Rushdie, Hadi Matar. Mas l’insult a l’islam ressentit pels detractors de Rushdie sembla d’aver perdurat e mai los decennis ajan passat.

Lo debat en cors sus Rushdie (coma o implicava l’article de Time de 1989 sus la fatwa) a revelat las linhas de division entre Occident e l’islam que s’èran amagadas. Aquelas linhas de division insinuavan, segon l’argument, una diferéncia radicala entre çò que constituís la responsabilitat artistica en Occident e en Orient (aqueste definit estrechament coma l’Orient islamic e çò que V.S. Naipaul nomenava las nacions “convertidas” a l’islam).

Aquel discors de la diferéncia radicala èra ja intrat dins la recèrca umanista europèa, coma Edward Said o aviá notat dins son libre magistral de 1979, Orientalism . D’unes an sostengut que Los versets satanics de Salman Rushdie avián mes al centre del debat un objècte tangible que poiriá èsser designat coma un exemple definitiu de l’antagonisme de l’Occident envèrs l’islam.

Per la majoritat dels legeires que prèsan l’autonomia relativa del roman coma òbra d’art, s’agís d’una lectura falsa e quitament enganaira, de la natura mediatizada de la relacion entre l’art e l’istòria. Mas coma o mòstra lo recent còp de cotèl de Rushdie, la lectura es totjorn poderosa.

Malastrosament, Rushdie es massissament identificat (per d’unes) a de sentiments antiislamics. Aquò a desviat l’atencion de sa reüssida coma autor de qualques unes dels romans mai polits escriches long del sègle XX — un grand escrivan dont lo nom es regularament presentat coma un probable futur laureat del prèmi Nobel de literatura.

Mai qu’un escrivan

Salman Rushdie, un musulman indian, nasquèt dins una familha musulmana laïca e cresquèt amb los libres e lo cinèma. Son paire, Ahmed Rushdie, aviá longtemps desirat de reorganizar l’Alcoran cronologicament.

Rushdie nasquèt qualques meses abans l’independéncia d’Índia. L’Índia qu’el coneguèt abans de partir devèrs lo prestigiós pensionat anglés de Rugby en 1961 èra l’Índia incontestablement laïca de Nehru. Aquela vision liberala nehruviana, qu’Índia sembla d’aver perdut, a guidat son escritura e es estada l’inspiracion darrièr lo succès espectaclós de son segond roman, laureat del prèmi Booker, Midnight’s Children (1981) — e los elògis de la critica qu’an seguit sos romans mai creatius, valent a dire Shame (1983), The Moor’s Last Sigh (1995), The Ground Beneath Her Feet (1999) e The Enchantress of Florence (2008).

Coma un autre escrivan de la diaspòra indiana mondiala, V.S. Naipaul, Rushdie èra vengut en Occident amb la tòca exprèssa de venir romancièr. La fatwa l’a dramaticament transformat en quicòm mai qu’un escrivan: de fach, en una icòna culturala que representa l’importància de la libertat d’expression d’un escrivan.

Aquela revendicacion de libertat es diferenta de la libertat d’expression generala que totòm ne gaudís dins las democracias liberalas. La libertat d’un escrivan es d’un autre òrdre. Es una libertat ganhada pel trabalh e per l’excelléncia artistica. Aquela libertat es condicionala: es pas accessibla a totes los escrivans. Deu èsser meritada, en intrant dins lo canon de la literatura mondiala— mas pas necessàriament en tèrmes de la definicion europèa de la literaritat. L’ensemble dels trabalhs de Rushdie indica que l’a meritada.

Mas se pòt pas restar aquí. L’experiéncia de Rushdie presenta egalament lo dilèma de saber cossí negociar aquela libertat a travèrs de las culturas — en particular amb de culturas regidas per d’absoluts morals e religioses sonhosament definits.

L’isteria violenta generada pel tractament magic que Rushdie fa de Maomet dins Los versets satanics es estada, enfin, limitada a una petita minoritat. Mas es sovent aquela petita minoritat qu’arriba pas de legir allegoricament los absoluts, coma previst.

L’incident de Chautauqua se seriá pas degut produire, mas se produguèt. Es un prètz que l’art paga periodicament, mai que mai quand es pres coma un aisit boc emissari per de diferéncias istoricas mai complèxas.

Vijay Mishra
Universitat Murdoch, Perth, Austràlia
Article publicat dins The Conversation lo 14 d’agost de decembre de 2022

[Sorsa: http://www.jornalet.com]
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